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Où en sont-elles ? Polémiques et histoire des femmes

Publié le mardi 26 avril 2022 . 5 min. 36

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Les relations hommes-femmes, sujet de préoccupation majeure pour la gestion des organisations, sont l’objet de toutes les attentions de la part des sociologues, des psychologues et des philosophes, placés sous l’influence de ce qu’il est convenu d’appeler la troisième vague féministe. Sur cette antenne les sujets de l’émancipation des femmes par l’entreprenariat, ou la réalité du plafond de verre dans l’accession aux responsabilités, ont déjà été abordés. J’y ai moi-même évoqué le « female gaze » ou encore la quête de nouvelles masculinités, susceptibles de se remettre en phase avec le processus historique de la libération des femmes. Dans mes propres travaux parus dans la revue scientifique « Organization » consacrés au leadership féminin, je m’intéressai avec une collègue aux stéréotypes de genre dans la manière avec laquelle nous concevons généralement la vision stratégique.


Mais force est de constater qu’aucun d’entre nous ici même ne s’est jamais intéressé à cette question à partir de l’évolution des systèmes familiaux, domaine propre à l’anthropologie. Or, dans le but de prendre à revers les idées de plus en plus admises sur la notion de genre, Emmanuel Todd signe un texte qui s’intéresse justement aux « 300 00 ans d’habitudes » familiales qui ne peuvent selon lui être « effacées en 70 ans » (p. 257). Commençons par écouter en trois points les principaux axes de son argumentation :


- Premièrement, il faut rappeler nous dit-il que l’étude des chasseurs-cueilleurs met en évidence que l’expérience du couple, l’homme qui chasse, et la femme qui cueille, la chasse et le soin, n’est pas du tout l’histoire d’une lutte acharnée entre époux mais au contraire le récit d’une entraide pour la conservation de l’espèce humaine. « Dans aucun cas le statut de la femme ne peut être fortement abaissé » explique Todd, « précisément à cause du principe de solidarité et d'entraide entre époux, condition de base de la survie économique. » (p. 84) L’oppression venant du « milieu (plutôt) que du mari » (p. 48). Ainsi que le mettrait en évidence l’atlas ethnographique illustrant le livre, évoquant le parcours de 1291 peuples (p. 38), ce patriarcat est loin d’avoir été le modèle dominant dans le monde, où prolifèrent tout aussi bien des « systèmes de parenté bilatéraux, dans lesquels les ascendants paternels et maternels pèsent d’un poids équivalent dans la définition du statut social de l'enfant. » (p. 37). Placer sous la coupe du patriarcat des systèmes aussi différents que ceux qui existent en Inde, en Chine ou en Europe nous empêche indique l’auteur de nous faire une juste idée de l’histoire de cette relation. Et si le patriarcat a si vite rendu les armes en Europe, c’est tout « simplement « parce qu'il (n’a) jamais vraiment existé », ainsi qu’il fait valoir p. 19. La preuve en serait notamment le soin apporté par des (p. 12) « pères (et de mères bien sûr) soucieux de l'éducation de leurs filles, mieux » ajoute-t-il, « de(s) pères ne considérant pas l'éducation de leurs filles comme moins importante que celle de leurs fils. »


- Si nous ne l’admettons pas, c’est peut-être que nous serions entrés dans une ère de « matridominance idéologique » (p. 23), et c’est là le deuxième point-clé du raisonnement. Todd s’appuie sur le concept gramscien d’hégémonie pour avancer, non sans un sens prononcé de la provocation, que les domaines de la culture et du journalisme se seraient d’ores et déjà abonnés au pouvoir des femmes. De telle sorte que si la situation de dominance de nos sociétés résiste encore dans les 4% des familles possédant les plus hauts revenus, même en Suède où se sont encore des hommes qui occupent les postes-clés dans les conseils d’administration, dans la petite bourgeoisie se serait la matridominance qui l’emporterait. Au point que ce sont les hommes aujourd’hui qui, statistiquement, « se marient au-dessus de leur condition éducative » (p. 206).


- Dans un troisième temps de l’analyse, l’anthropologue explique que si un féminisme d’antagonisme existe bel et bien aujourd’hui, notamment dans le monde anglo-américain du fait de l’influence du paternalisme protestant, ce serait parce que les femmes se trouvent maintenant confrontées à des problèmes auparavant réservés au sexe jadis dit fort : en gros la gestion concomitante d’une vie personnelle et professionnelle. Il utilise le terme « d’anomie douce » empruntée à Durkheim pour expliquer l’anxiété féminine contemporaine par le fait que les femmes sont finalement soumises dans les conditions du présent aux mêmes frustrations que les hommes. Pour illuster il ajoute : « le reflux du tabagisme et de l'industrie a mis des hommes à l'abri (et parfois au chômage), tandis que l'entrée des femmes dans une vie sociale indépendante les a exposées aux risques masculins classiques du tabagisme, de l'alcoolisme, des stupéfiants autres et des accidents de la route » (p. 212).


Au final, on remarquera que cet essai, dont les thèses sont toutes discutables, ne manquera d’animer de nombreux débats. Mais notons d’ores et déjà que dans sa manière de revendiquer l’utilisation du rasoir d’Ocham, à savoir rendre simple un problème compliqué, l’argumentation parfois s’égare comme sur la transidentité qui revisiterait un « vieux rêve chrétien » (p. 354), et plus généralement dans sa manière de croire un peu trop vite à des « faits de nature » qui prétendraient avoir une influence directe sur nous, peuplades de la postmodernité.


En revanche il nous interroge plus fondamentalement sur la question de savoir, du fait qu’Homo Sapiens doit sa survie aux liens d’amitié entre hommes et femmes, sur ce que nous voulons faire de cette relation dans un contexte de crises tous azimuts. Mais si l’auteur opte pour un féminisme de réconciliation, il n’en prend guère le chemin avec ce livre dont l’envie de batailler transparait à chaque chapitre. Or face à l’endettement, au chômage de masse et au dérèglement climatique, il y a fort à parier que les liens entre hommes et femmes seront bientôt plus précieux que jamais, ne serait-ce que pour donner tort à la sombre prophétie d’Alfred de Vigny, qui dans la Colère de Samson écrivait ceci : “La Femme aura Gomorrhe et l'Homme aura Sodome, Et, se jetant, de loin, un regard irrité, Les deux sexes mourront chacun de son côté.”


D'APRÈS LE LIVRE :

Où en sont-elles? Une esquisse de l’histoire des femmes

Où en sont-elles? Une esquisse de l’histoire des femmes

Auteur : Emmanuel Todd
Date de parution : 21/01/2022
Éditeur : Seuil
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