La politique a toujours été affaire de conviction, de discours et de rapports de force. Les dirigeants revendiquent leur intuition, leur flair et leur expérience comme autant de piliers de leurs décisions. Mais avec l’intelligence artificielle, les règles du jeu changent. Fini le flair et les petites phrases calibrées au doigt mouillé : l’algorithme ne flatte pas, il analyse, calcule et modélise. Il met en lumière des tendances invisibles et mesure en temps réel les effets d’une décision.
Une approche froide face aux dynamiques politiques
Un atout majeur pour éclairer les choix des gouvernants ? Pas si sûr. Car la politique, ce n’est pas qu’une question de logique froide et rationnelle : c’est aussi l’art de raconter une histoire, de susciter l’adhésion, voire de tordre légèrement la réalité pour construire une vision mobilisatrice. Une approche purement analytique risque de gommer la part émotionnelle et narrative essentielle pour fédérer et entraîner une société vers un projet commun.
Une machine à anticiper ?
L’IA excelle dans la prédiction et l’optimisation : elle peut anticiper les résultats électoraux, détecter les signaux faibles d’une crise, affiner les discours en fonction des attentes des citoyens. Aux États-Unis, ces outils sont déjà massivement utilisés. Lors des dernières présidentielles, des algorithmes ont micro-ciblé les électeurs indécis et adapté les messages politiques pour maximiser l’impact des campagnes. En France, la prudence reste de mise, mais certains partis explorent ces technologies avec intérêt. Peut-on imaginer une politique entièrement guidée par la donnée et non par l’instinct et le charisme ? Le leadership se résume-t-il à une analyse algorithmique ?
La donnée contre l’idéologie
L’IA fonctionne avec des faits, pas avec des dogmes. Imaginez un gouvernement testant l’acceptabilité sociale d’une réforme avant même de la proposer. Une forme de démocratie augmentée ? Peut-être. Mais l’histoire montre que les grands changements ont souvent été le fruit de ruptures, d’audaces visionnaires. Or, l’IA, en s’appuyant sur le passé, peine à concevoir l’inattendu. Elle est un formidable outil d’optimisation, mais peut-elle inspirer des révolutions politiques ?
Un garde-fou ou une excuse ?
En Chine, l’IA est un instrument de contrôle de l’opinion publique, ajustant en temps réel le discours officiel pour neutraliser toute contestation. Une tentation pour les régimes autoritaires, mais qu’en est-il des démocraties ? L’IA pourrait-elle servir de garde-fou, empêchant les décisions absurdes ou inconsidérées ? Ou bien deviendra-t-elle un alibi pour justifier des choix impopulaires ? « Ce n’est pas nous, c’est l’algorithme ! » pourrait devenir le nouvel élément de langage des gouvernants en quête de déresponsabilisation.
Les politiques veulent-ils vraiment de la vérité ?
L’intelligence artificielle peut fournir des analyses limpides, identifier les tendances émergentes et détecter les signaux faibles. Mais au final, la décision reste humaine. Les gouvernants choisiront-ils la vérité des faits, la facilité des solutions consensuelles ou la tentation démagogique ? L’IA ne remplacera jamais le courage politique, ni le sens des responsabilités, ni le charisme.
Publié le mardi 25 février 2025 . 3 min. 36
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