Xerfi Canal a reçu Renaud Cochet, Vice-Président en charge des activités Supply Chain – CGI, pour parler des opportunités de la continuité numérique dans l'entreprise.
Comment est-ce que vous définiriez cette Continuité numérique ?
J’aime bien faire un détour par la biologie et utiliser l’image du système nerveux pour l’expliquer. Le système neuronal est composé de centres régulateurs et d’un vaste réseau de neurones (+100 000 km chez l’Homme) qui permettent à la fois des réactions réfléchies et automatiques, de l’ordre du reflexe. Et toute l’efficacité du système dépend de l’information qui circule tout au long de la chaîne, jusqu’au cerveau. La donnée en est la moelle épinière. Mettre en place la Continuité numérique dans une entreprise, c’est l’idée de travailler sur l’échange de données pour améliorer l’efficacité de l’information et de la prise de décision, qu’elle soit réfléchie ou automatique.
Faut-il en déduire qu’il y a une lacune à combler à ce niveau-là dans les entreprises ?
Il faut bien admettre que les industriels traitent aujourd’hui des quantités énormes de données structurées ou non-structurées mais que cette masse est largement sous-exploitée. La raison, c’est qu’on a du mal à faire la connexion entre les différents silos qui composent l’entreprise : achat, développement, production, partenaires, etc… Au final, il y a une véritable déperdition qui nuit à l’efficacité informationnelle.
Alors comment passe-t-on de l’organisation en silo à la Continuité numérique ?
L’idée, c’est de faire converger trois mondes distincts qui jusqu’alors n’avaient pas vocation à opérer ensemble. Premièrement : le monde IT, à savoir le paysage informatique existant dans l’entreprise. Deuxièmement : le monde OT (Operation Technology), c’est-à-dire tout ce qui permet le dialogue des machines entre elles : les capteurs, l’IoT, les imprimantes 3D, etc… Et enfin, le Web et la mobilité, c’est-à-dire tout ce qui met l’information dans la poche des équipes et des clients. Les avancées technologiques permettent aujourd’hui d’envisager la mise en œuvre à grande échelle et à des coûts sans précédents de cette Continuité numérique issue de la convergence des trois mondes.
Une fois cette Continuité numérique mise en place, quels résultats observe-t-on ?
Il y a plusieurs scénarios : on peut par exemple avoir une intégration horizontale de la chaîne de valeur. Je pense là à un client pour lequel on a mis en place une visibilité complète de la supply chain : accessible en temps réel par tous les acteurs, depuis l’usine jusqu’au chantier de mise en œuvre. Mais cette intégration peut aussi être verticale. Je pense ici à un fabricant de moteurs d’avion qui a fait le lien entre les données de ses départements R&D et production, deux domaines historiquement silotés, qui obéissent à des logiques différentes entre prototypage d’un côté et industrialisation des processus de l’autre. Et qui est ainsi aujourd’hui capable de régler ses machines-outils automatiquement sur la chaine de production en fonction des caractéristiques techniques particulières du produit à fabriquer.
Quelles conséquences cette mise en place a-t-elle sur l’organisation de l’entreprise ? Faut-il la revoir ?
La convergence n’est pas que technologique, elle est aussi organisationnelle. Mais attention à ne pas confondre une réorganisation avec une rupture brutale : il s’agit avant tout d’accompagner les entreprises dans la continuité. On constate aujourd’hui une surenchère autour de la disruption, de l’ordre du mythe. Par exemple, Volkswagen, qui a récemment recruté le directeur système d’Apple. On a ensuite pu lire que Volkswagen devait se transformer en une entreprise de logiciels et de services ! Cela semble un peu exagéré...
Alors avez-vous un contre-exemple ?
Oui, regardez Nike : ils se sont lancés dans la basket personnalisée puis les objets de sport connectés (bracelet, skates, ballons) il y a quelques années. Aujourd’hui – et je ne suis pas sûr qu’ils l’avaient autant anticipé -, ils se retrouvent avec une quantité de données clients qu’ils peuvent monétiser (comme sur la santé) ou sur lesquelles ils peuvent s’appuyer pour développer de nouveaux services (renouvellement du matériel, coaching sportifs…). Tout cela à partir de leurs produits historiques. On voit bien dans cet exemple l’enjeu qu’il y a derrière la Continuité numérique car une donnée bien exploitée, c’est ce qui permet d’améliorer l’expérience client, en ouvrant de nouvelles opportunités !
Publié le mardi 08 novembre 2016 . 5 min. 25
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