Face à des fins de mois de plus en plus tendues, les Français ont massivement recours aux crédits à la consommation. Pour preuve, le dynamisme de la production de crédits nouveaux auprès des particuliers a poussé les encours au niveau record de 200 milliards d’euros en septembre 2022.
Crédits renouvelables et découverts
Certes, une partie de cette somme est directement affectée au financement de l’achat d’automobiles (aussi bien neuves que d’occasion), mais est aussi dédiée à l’amélioration de l’habitat ou autres équipements du logement, ce qui, en soi, ne pose pas de problème. En revanche, l’inquiétude vient plus particulièrement de deux lignes :
1. La première, celle du crédit renouvelable (aussi appelé crédit permanent ou revolving). Cette facilité de paiement, une réserve généralement associée à une carte de crédit, est de plus en plus mobilisée par les ménages pour effectuer leurs achats courants et les encours sont en forte progression. Partant d’un niveau faible, il est vrai. Mais c’est une pratique coûteuse : le taux d’intérêt moyen au sens étroit (c’est-à-dire hors frais de dossier et d’assurance) était en moyenne de 7,5% en juin 2022, avec de profonds écarts entre d’un côté, le canal bancaire avec un taux d’intérêt inférieur à 5% et de l’autre, les établissements spécialisés où il dépasse 12%. Les ménages ont pleinement conscience de la ponction faite sur leur revenu de cette pratique, ainsi selon l’Observatoire Xerfi du crédit à la consommation et des facilités de paiement réalisé en novembre 2022, 74% des Français voient le crédit renouvelable comme un financement onéreux avant d’être un financement souple, mais pour beaucoup c’est une solution de dernier recours.
2. Mais c’est surtout l’augmentation explosive de la ligne « comptes ordinaires débiteurs », autrement dit des « découverts », qui est hautement préoccupante. Les encours dépassent désormais 10 milliards d’euros et représentent plus de 5% de l’ensemble des crédits à la consommation. Ils se situent de la sorte à un pic depuis près de 20 ans.
Surendettement
Avec le retour de l’inflation, le pouvoir d’achat est attaqué et il baissera cette année sans espoir de remontée en 2023. Les ménages le vivent déjà pleinement. Le solde d’opinion correspondant à leur situation financière personnelle s’est dégradé et ils se sont mis en mode « défensif » en différant leurs achats importants. S’ils ont recours à certaines facilitées de paiement, ce n’est donc pas tant pour financer des dépenses de conforts ou de loisirs, mais bien plus pour assurer leurs dépenses contraintes : alimentation, habillement, électricité, loyer, abonnement téléphonique, impôts, la liste est longue.
C’est un jeu dangereux comme le montre l’accroissement des flux d’inscription au fichier central national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers qui recense les personnes qui ont rencontré des difficultés dans le remboursement d’un crédit souscrit à titre personnel, ainsi que les personnes en situation de surendettement dès la date du dépôt d’un dossier auprès du secrétariat d’une commission de surendettement. À fin octobre près de 665 000 inscriptions étaient comptabilisées, c’est 18% de plus que sur la même période de 2021. Autre signe que les finances de nombreux Français se sont durcies, la hausse concomitante de 10% sur la même période des inscriptions dans un autre fichier, celui du fichier central des chèques qui comptabilise les personnes ayant émis un chèque sans provision ou sous le coup d’une interdiction judiciaire d’émettre des chèques ainsi que les individus s’étant vu retirer leur carte bancaire à la suite d’un usage abusif.
Les dettes à la consommation prises dans leur ensemble restent la principale cause du surendettement : 71,5% des dossiers de surendettement recevables au 3e trimestre 2022 comportaient au moins une dette à la consommation, contre 11,1% comportant au moins une dette immobilière et, en valeur, les dettes à la consommation constituent le premier poste de dettes dans l’endettement global des personnes surendettées.
Certains ménages, faute d’alternative, se sont engagés dans une véritable fuite en avant dans le crédit à la consommation. Le surendettement qui n’avait cessé de refluer depuis le milieu des années 2010 risque bien dans ce contexte de faire un retour en force.
Publié le jeudi 01 décembre 2022 . 4 min. 39
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