Le logement est devenu écrasant dans le budget des ménages, notamment des plus modestes et le rêve pavillonnaire inaccessible pour une part croissante de Français.
Le logement, c’est 19% des revenus des Français (en moyenne)
Il y a d’abord l’évolution du taux d’effort net pour se loger qui permet de prendre la mesure de l’alourdissement des dépenses liées à l’habitat. Cet indicateur d’accessibilité au logement reprend, en effet, l’ensemble des dépenses attachées à la résidence principale (loyers, remboursement des emprunts, dépenses en eau, en énergie, taxe d’habitation / foncière, assurances, etc.) auquel sont soustraits les aides au logement, le tout rapporté aux revenus après impôts. Ce n’est, ni plus ni moins, que le reflet des retombées en trésorerie pour les ménages et correspond assez bien à leur ressenti sur l’effort financier instantané consenti pour disposer d’un toit et des charges d’occupation qui y sont liées. Et cet effort est de plus en plus intense. En moyenne, les Français consacrent ainsi plus de 19% de leurs revenus aux dépenses de logement, un chiffre en hausse quasi structurelle. Certes, cette progression est en partie le résultat de l’amélioration des conditions d’habitation avec des logements plus spacieux, mieux chauffés, mieux équipés. Mais c’est aussi le reflet, principalement dans les grandes villes, de la hausse rapide des loyers et du prix au mètre carré, plus rapide que celle des revenus.
Il s’agit en outre d’une moyenne. Or, il y a une première source d’écarts importants : le statut d’occupation : Pour les propriétaires non-accédants (c’est-à-dire ceux qui n’ont jamais emprunté ou fini de rembourser leurs emprunts), le taux d’effort qui se limite aux taxes et charges pèse peu sur le revenu, moins de 10%, mais il s’élève à 26% pour les propriétaires accédants. Si habiter un logement social permet d’abaisser la part des dépenses dans le budget des ménages, les locataires y consacrent quand même 26% de leur revenu, contre 16% au milieu des années 80. Pour les locataires du parc privé, le taux d’effort monte à près de 30%, c’est 11 points de plus en 35 ans environ.
Mais le budget logement c’est surtout une fonction décroissante des revenus. Il absorbe ainsi plus de 42% des ressources financières des 10% les plus pauvres, contre à peine 11% pour les 10% les plus aisés. Bref, pour les plus modestes, le logement coûte, toute chose égale par ailleurs, 4 fois plus cher qu’aux plus riches ce qui réduit considérablement leur reste à vivre.
La propriété de moins en moins accessible
Le désir fort de l’accession à la propriété devient de son côté de moins en moins accessible. Globalement, le taux de propriétaires de leur résidence principale ne progresse plus en France depuis 2015 où il atteint un sommet. Il se réduit depuis progressivement.
En cause la flambée des prix dans l’ancien. Alors qu’entre 1965 à 2000, l’acquisition d’un logement standard nécessitait en moyenne d’y consacrer 2,5 années de revenus, il en faut aujourd’hui près de 5, soit quasiment le double. L’allongement de la durée des emprunts et la baisse des taux ont dilué en partie les hausses de prix, mais en partie seulement.
Pour certains, les charges de remboursement sont ainsi devenues trop lourdes pour accéder au marché de l’accession : le taux de propriétaires parmi les 25% les plus modestes chez les 25-44 ans est ainsi passé de 34% au milieu des années 70 à 16% aujourd’hui. En revanche, il a bondi de 43 à 66% pour les 25% les plus favorisés. Cette évolution à front renversé, c’est une nouvelle ligne de fracture sociale ou dit autrement, le choix de devenir propriétaire ou de rester locataire n’en est plus vraiment un pour une partie de la population.
De fait, pour les locataires âgés de 25 à 44 ans, la probabilité d’acquérir un jour une propriété sans aide externe est de 6% pour les 25 % les plus modestes, une probabilité qui s’élève à 18% en cas de donation ou d’héritage. En haut de l’échelle, les taux sont respectivement de 36 et 50% soit 44 points de différences pour les valeurs les extrêmes.
Les dépenses de logements ont des effets sur la consommation
Ces évolutions ont de fortes répercussions sur la qualité de vie. Il devient ainsi difficile pour certaines familles d’adapter leur logement (nombre de pièces, taille) à la leur configuration familiale. Surpeuplement, suroccupation sont des indicateurs en hausse. Deuxième conséquence, la contrainte à l’éloignement des centres urbains dont les prix et les loyers sont devenus prohibitifs pour les classes modestes et populaires. Le périurbain, c’est avant tout un choix économique avec des conséquences en cascades en termes de budget transport, de fatigue accumulée, etc.
Enfin, les dépenses de logements empiètent de plus en plus sur la consommation. Les loisirs, la culture et les vacances font partie des premiers postes sacrifiés. Le taux de départ en vacances d’une personne seule disposant de moins de 1 200 euros de revenu mensuel a chuté de 10 points en 20 ans, passant de 47 à 37%, alors qu’il est resté quasiment stable à l’autre bout de l’échelle à plus de 80%. Non seulement le coût du logement pour les classes modestes pèse de plus en plus lourd, mais les inégalités de consommation se sont creusées en cascade avec le reste de la population au risque de voir monter les frustrations. Une véritable bombe sociale à retardement.
Publié le mardi 14 septembre 2021 . 4 min. 46
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