C’est inévitable : l’immobilier va se faire rattraper par le Covid-19. D’abord, parce qu’un achat immobilier demande, comme tout gros investissement, de la visibilité sur le long terme, notamment sur ses revenus, et un climat de confiance. Les futurs acheteurs vont donc temporiser quelques mois et attendre que la situation se soit calmée pour se lancer. Ensuite, une transaction immobilière demande beaucoup d’échanges humains : avec les agents immobiliers, les banquiers, le notaire, les artisans pour les travaux sans compter les visites. Pendant cette période d’épidémie et de confinement, cette chaîne va être, c’est inévitable, momentanément rompue.
Un bref décrochage des ventes à court terme
Certes, les visites virtuelles sur les sites des professionnels vont se multiplier. Mais dans de nombreux cas, cela n’ira pas au bout, pas tout de suite. Il faut donc s’attendre à un sérieux décrochage des ventes. Dans un contexte d’incertitude radicale, difficile de mettre un chiffre en face de ce décrochage. Le choc sera d’une violence instantanément plus intense que celui de la Grande récession, mais normalement beaucoup plus court aussi : 2008-2009, deux années qui ont vu les transactions passées de 800 à 560 000 transactions, soit une chute de 30%, cela donne un ordre de grandeur. Mais c’est une borne supérieure. La nature du choc n’est en outre pas du tout le même. Avec la Grande récession, les acheteurs avaient déserté le marché, les vendeurs beaucoup moins même si certains ont pu faire de la rétention en retirant leurs biens en attendant des jours meilleurs. La chute des transactions s’était donc très rapidement transmise aux prix, en repli de 9,4% entre début 2008 et la mi-2009.
Avec le coronavirus, les acheteurs comme les vendeurs seront massivement absents du marché pendant quelques mois. Des ventes continueront à se faire, mais sur de très petits volumes, avec des vendeurs sous contraintes fortes à la recherche urgente de liquidités par exemple. Les prix baisseront donc mais cela ne sera pas significatif.
Un choc sans précédent qui appelle des réponses inédites
Une fois l’épidémie passée, trois éléments seront à prendre en compte :
1. Les taux d’intérêt sont partis pour rester historiquement bas. Ils étaient déjà à un plancher à peine supérieur à 1% et ne devraient pas beaucoup varier. Les OAT à 10 ans — qui donnent la direction des taux d’intérêt des crédits immobiliers — sont également descendus à des niveaux inconnus. Et ni la politique de la BCE, ni la fuite vers les placements les plus sûrs qui s’étaleront bien après la fin du Covid-19 permettent d’entrevoir un véritable retournement. La concentration des risques sur les États peut les faire remonter transitoirement. Mais ils resteront durablement bas.
2. Les placements alternatifs à l’immobilier ont pris une telle claque, la volatilité du CAC 40 est si hallucinante, que cela restera longtemps dans les mémoires. C’est ce qui est appelé l’effet d’hystérésis. Le marché action aura du mal à se remettre d’une chute aussi brutale qui lui a fait perdre 32% de sa valeur entre le 20 janvier et la mi-mars.
3. La capacité de rebond va largement dépendre de la faculté de la France et de l’Europe à répondre à cette crise inédite. De deux choses, l’une : ou la réponse européenne est inédite, les dettes contractées durant cet épisode seront rayées et passées en pertes et profits. Ou bien, chacun sera comptable de ce qu’il a mis en œuvre, les bilans bancaires seront dégradées et l’économie affectée pendant de longues années, avec à la clé, croissance en deuil, hausse du chômage, baisse des revenus des ménages et un marché de l’immobilier affaibli.
Ce n’est pas le plus sûr et l’immobilier pourrait bien sortir renforcé du Covid-19.
Publié le jeudi 19 mars 2020 . 3 min. 27
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d'Alexandre Mirlicourtois
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