Pétrole : pourquoi les cours vont baisser
Publié le lundi 13 janvier 2014 . 3 min. 58
Xerfi Canal présente l'analyse d'Alexandre Mirlicourtois, directeur de la conjoncture et de la prévision de Xerfi
C'est une première depuis près de 20 ans. Les Etats-Unis ont produit davantage de pétrole qu'ils en ont importé en octobre dernier. Ce n'est pour l'instant qu'un chiffre de l'agence internationale de l'énergie. Mais il illustre la nouvelle montée en puissance des puits américains : à 7,7 millions de barils jour, la production s'est hissée à ses niveaux de la fin des années 80. Et l'administration américaine prévoit 8,5 millions de barils jours en moyenne cette année. Il faut dire que le développement du pétrole non-conventionnel offre une nouvelle jeunesse à l'industrie pétrolière américaine. A tel point que celle-ci devrait même, selon l'AIE, détrôner l'Arabie Saoudite de sa première place d'ici 2015, c'est-à-dire demain ! C'est donc bien toute la scène internationale qui est chamboulée. Mais le new deal pétrolier mondial ne se limite pas à l'exploitation de nouveaux gisements aux Etats-Unis. Le Brésil par exemple devrait pouvoir produire près de 6 millions de baril jours d'ici 2035 grâce à l'exploitation des ses ressources offshore en eaux profondes contre 2 millions environ aujourd'hui. De futures puissances pétrolières vont aussi animer le marché comme l'Australie qui ambitionne de détrôner le Qatar d'ici quelques années ou le Canada qui commence tout juste à exploiter ses immenses réserves de sables bitumineux. En dix ans à peine, les réserves exploitables de pétrole ont bondi de près d'un tiers. S'ajoutent deux facteurs ponctuels. Le premier, c'est celui du retour imminent de l'Iran avec 1,2 million de barils supplémentaires par jour arrivant sur le marché. C'est aussi la perspective d'une exportation du pétrole du Kurdistan irakien, une région où les réserves, c'est-à-dire les stocks, de pétrole sont estimées à 45 milliards de barils. Bien sûr, il faut aussi parler de l'épuisement des anciens gisements et du coup de frein des investissements de l'Arabie Saoudite et des pays du Golfe. Et bien sûr aussi des risques géopolitiques ou sociaux. Les affrontements au Sud Soudan ou les mouvements sociaux en Libye pèsent les quantités produites. Mais le mouvement de fond est bien celui d'une hausse de l'offre. Elle aurait atteint 91,7 millions de barils jours en 2013 selon nos prévisions, soit presque + 1% sur 2012. En 10 ans, ce sont quasiment 12 millions de barils jours qui se sont ajoutés, soit quand même 4,4 milliards de barils sur un an Plus personne ne parle de « peak oil » aujourd'hui et le mouvement va bien sûr s'étendre en 2014 avec à la clé une production record de 92,6 millions de barils jours. Face à cette offre, il y a bien entendu une demande? elle aussi en hausse. D'abord sous l'impulsion de la croissance mondiale mais également de la pression croissante des pays émergents. C'est là qu'entre en scène l'actuel rééquilibrage de la croissance mondiale en faveur des pays avancés. Pour faire bref, là où la croissance est la moins énergivore. Alors une demande en hausse oui, mais moderato lorsqu'on la met en perspective des dernières années. La peur du manque s'éloigne donc. On l'aura compris, le contexte n'est pas celui d'une nouvelle flambée des cours du pétrole mais de son apaisement relatif. Nous prévoyons ainsi un cours du Brent à 105$ le baril contre 109 en 2013. En deux ans, il aura ainsi cédé près de 7 dollars, soit 6% environ de sa valeur. Pour le pétrole, la crise est bel et bien finie. Même si le monde reste en quête d'une équation énergétique durable.
Alexandre Mirlicourtois, Pétrole : pourquoi les cours vont baisser, une vidéo Xerfi Canal
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