Pour réussir le pari de la décarbonation de nos sociétés, les énergies renouvelables sont clés et ont été clairement identifiés dans le pacte vert européen. Or, en matière de panneaux photovoltaïques, l’Union européenne est très dépendante des capacités de production chinoises puisque :
• La Chine fournit 80% des panneaux photovoltaïques assemblés
• Elle est encore plus présente sur d’autres parties de la chaîne de valeur comme la fabrication des cellules ou des wafers
• 9 fabricants sur les 10 premiers mondiaux sont chinois
Cette situation est d’autant plus paradoxale que les pays européens étaient en avance sur cette filière dans les années 2000. L’explication facile à donner est celle des coûts de production, mais elle est plutôt à rechercher dans l’absence de vision industrielle du côté européen, quand la Chine a élaboré une vraie stratégie industrielle avec :
• Développement important de capacité de production
• Mise en place de subventions et de prêts à taux d’intérêts faibles pour financer les unités de production
• Stratégie d’intégration verticale de la filière avec notamment la maîtrise des approvisionnements en matières premières
Avec cette vision, la Chine a baissé fortement les coûts de production, ce qui lui a permis d’inonder le marché et de dépasser ses concurrents.
En décembre 2022, la Commission européenne a créé l’Alliance européenne de l’industrie solaire avec la volonté de mettre en place une chaine de valeur européenne. Son objectif est de développer une capacité de production annuelle de 30GW d’ici à 2025, ce qui ne sera pas suffisant pour couvrir les besoins européens qui était de 40GW en 2022.
Néanmoins, la France et l’Europe disposent de quelques atouts :
• Existence d’entreprises européennes positionnées à différents niveaux de la chaîne de valeur y compris sur la production de silicium
• Production d’une énergie bas carbone dans plusieurs États membres, même un enjeu autour de la maîtrise des coûts de l’électricité
• Possibilité de trouver des synergies entre ce secteur et d’autres secteurs où la France dispose de technologies de pointe (microélectronique, automobile, etc.)
Toutefois, s’il existe des acteurs européens, il n’y aura pas de relocalisations massives sans :
• Massification des capacités de production
• Accès aux matières premières
• Développement des compétences techniques
• Financement des capacités de production
• Sécurisation de l’accès aux marchés européens pour sécuriser les acteurs européens qui vont investir dans des capacités de production
En outre, il faut envisager un rôle plus offensif des États :
• Évolution des clauses des marchés publics avec une primauté donnée au bilan environnemental et social des productions
• Efficacité de la taxe carbone aux frontières européennes
• Développement de mesures anti-dumping sur le modèle de ce qui a été fait pour le vélo
• Miser sur des technologies émergentes
Une production européenne aura un impact sur les prix, mais le niveau d’automatisation des usines, les évolutions technologies et les gains d’échelle tendent à réduire fortement l’écart de prix en France et Chine.
À ce stade, il n’est pas possible d’envisager d’arrêter les importations car cela freinerait la transition énergétique des pays européens. La reconstruction de la filière prendra du temps, et obligera surement à faire des choix en termes de segments de marchés dans un premier temps.
Nous sommes dans une course mondiale pour les relocalisations, le moment est donc critique. Sans investissement bien plus important, l’Union européenne restera dépendante d’autres pays pour les panneaux photovoltaïques. La souveraineté n’existera pas sans choix géopolitiques et économiques.
Publié le lundi 23 octobre 2023 . 3 min. 51
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