Xerfi Canal présente l'analyse de Jean-Michel Quatrepoint, Journaliste-essayiste
Dans la torpeur du mois d'août, Barack Obama a pris une décision spectaculaire. Il a tout simplement mis son veto à une décision de la commission américaine du commerce international interdisant la commercialisation aux Etats-Unis de certains modèles d'iPhone et iPad par Apple. Avant l'été, la commission avait donné raison à Samsung qui accusait Apple de ne pas avoir payé les brevets pour certains des composants de ses produits phares.
En prenant le contre-pied de cette décision, Barack Obama donne un sérieux coup de pouce à Apple dans la bataille qui l'oppose au géant coréen. Et il adresse un message subliminal. La raison invoquée pour ce veto risque, en effet, de faire jurisprudence. La Maison Blanche a justifié son veto par la nécessité de préserver la concurrence et de protéger les consommateurs américains. En clair, les Etats-Unis ont estimé que Samsung faisait en quelque sorte un abus de position dominante, en demandant des prix exorbitants pour l'utilisation de ses brevets.
Cette intervention directe de l'exécutif dans une querelle entre groupes privés est hautement symbolique. Surtout concernant Apple. Depuis quelques années, la firme à la pomme symbolisait l'arrogance des multinationales. Steve Jobs, peu de temps avant sa mort, avait opposé une fin de non-recevoir à Barack Obama qui lui demandait de rapatrier des emplois et de la valeur ajoutée sur le territoire américain.
Depuis, la roue a tourné. Steve Jobs est mort. Et Apple, d'icône de l'innovation technologique est devenue le champion de l'exploitation des ouvriers chinois, le champion de l'opacité des comptes, le champion de l'optimisation fiscale. Les attaques contre Apple sont venues de toutes parts. De la Chine, qui met des bâtons dans les roues à la vente de ses produits sur son territoire. Du Brésil, qui exige la localisation d'unités de production. De Samsung, bien sûr, principal fournisseur des composants des iPhone et autres iPad, qui, de partenaire est devenu le principal concurrent.
Mais les attaques sont également venues des Etats-Unis. Cela a commencé par la dénonciation dans les médias des conditions de travail des 250 000 ouvriers chinois de Foxconn qui ne travaillent que pour Apple. Et cela s'est poursuivi par l'offensive et la mise sur la place publique des montages financiers qui ont permis à Apple d'accumuler, au fil des ans, des dizaines de milliards de dollars de bénéfices, en ne payant pratiquement pas d'impôts.
Le point d'orgue de cette offensive, à laquelle la Maison Blanche ne devait pas être étrangère, ayant été la comparution du successeur de Steve Jobs, en mai dernier, devant les sénateurs américains. Le procès en incivisme était instruit.
Apple avait gagné la première manche contre Barack Obama. Mais il avait perdu la seconde face à l'exécutif et à l'opinion. La sanction se retrouvait d'ailleurs dans les cours de Bourse, l'action Apple ayant plongé.
Dès lors, les conditions d'un compromis étaient réunies. Apple a annoncé avoir payé 6 milliards d'impôts en 2012 aux Etats-Unis et qu'il en paierait plus en 2013. Et une usine de Mac a été relocalisée. Aux yeux de la Maison Blanche, ce n'est sans doute pas suffisant, mais en appuyant spectaculairement Apple dans son procès contre Samsung, Barack Obama montre qu'il n'est pas un ingrat et que l'administration américaine appuiera, défendra ses multinationales. Surtout celles présentes dans les nouvelles technologies. Pour peu que ces multinationales paient leurs impôts aux States et rapatrient de la valeur ajoutée. Dès lors qu'Apple se montrera bon citoyen : ce qui est bon pour Apple sera bon pour les Etats-Unis.
Jean-Michel Quatrepoint, Pourquoi Obama pardonne Apple, une vidéo Xerfi Canal
Publié le mardi 3 septembre 2013 . 4 min. 08
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