Xerfi Canal présente l'analyse d'Olivier Passet, directeur des synthèses économiques de Xerfi
La notion d'entrepreneur n'a jamais été bien stabilisée. Dès son origine qui remonte au 16ème siècle, la notion désigne celui qui dirige, organise la production et prend des risques, les économistes classiques vont le placer au cour du processus économique. Mais le mot a toujours désigné aussi celui qui se charge d'un ouvrage, derrière un maître d'ouvrage. C'est le sens qu'il garde encore aujourd'hui en droit, notamment dans le domaine de la construction.
L'ambivalence a traversé l'histoire et demeure aujourd'hui. La vision Schumpétérienne, qui fait de l'entrepreneur un acteur clé de l'innovation, dissone avec celle du petit patron, force de réaction et de conservation dans l'imaginaire collectif. Héros moderne, défrichant de nouveaux produits, de nouveaux process ou combattant plaintif contre le maquis administratif et fiscal, difficile de réunifier ces deux images. Il faut pourtant dépasser ce clivage lorsque l'on veut défendre l'entrepreneuriat en France. Car dans tous les cas, le propre de l'entrepreneur, c'est que son aventure humaine se confonde intimement avec celle de son entreprise.
Dans la guerre de mouvement économique à laquelle se livrent les grandes économies, disposer d'entreprises agiles, capables de renouveler rapidement les produits et les organisations constitue un enjeu essentiel. L'économie n'est pas aujourd'hui en régime de croisière, elle se cherche en permanence. Ce ne sont pas les paquebots de l'économie mondiale qui déplacent les frontières de la production. Mais plutôt une sous-catégorie d'entreprises, bien particulières et en petit nombre, qui sont mues par des projets de développement économique et humain.
L'on sent bien, dans le cas français, que c'est de là que viendra le renouveau de l'offre, que c'est de là que viendra la possibilité d'un rebond. L'Etat s'y est essayé à maintes reprises, avec une multitude d'aides aux effets incertains avec le statut de la jeune entreprise innovante par exemple. Avec un soutien aux véhicules financiers du capital investissement, avec l'avantage Madelin. Des avec le crédit impôt recherche. Il cherche, à travers un émiettement de critères et de niches hétéroclites, à toucher ce fameux entrepreneur schumpetérien, sans jamais complètement l'atteindre, avec une forte déperdition en effets d'aubaine et en jeux d'optimisation fiscale. Ni l'âge, ni la taille de l'entreprise, ni l'intensité en R&D, ni la cotation, ni la durée de détention des titres, ne permettent de cibler les Steve-Jobs en herbe.
Et pourtant, concentrer le tir des incitations sur ceux qui déplacent les lignes de la production constitue bien un enjeu essentiel, il faudrait un statut fiscal de l'entrepreneur. Mais comment demander au législateur d'identifier l'authentique aventurier de l'économie, alors même que la notion reste floue. Nous proposons ici deux pistes pour simplifier l'approche et gagner en efficacité.
Le législateur pourrait d'abord reconnaitre une chose essentielle :
Le risque auquel s'expose l'entrepreneur est particulier c'est un risque économique, un risque personnel qui n'est pas diversifiable, difficilement réversible, contrairement au financier, qui lui, peut diversifier et recomposer son risque au sein d'un portefeuille à tout moment. Les incitations ne tiennent pas suffisamment compte aujourd'hui de cette différence. Il faut davantage reconnaître dans notre système fiscal la graduation des risques entre l'entrepreneur qui s'engage de corps et d'argent dans son entreprise, le business angel qui peut mettre une part importante de son patrimoine sur un nombre réduit d'affaires et qui les accompagne, celui qui apporte une portion marginale de ses fonds dans un véhicule de capital investissement. et enfin celui qui détient un PEA.
Il faut ensuite prendre la mesure de la difficulté à laquelle est confrontée une petite entreprise pour attirer les compétences. C'est justement lorsqu'elle vise un développement qu'elle bute sur cette contrainte où est en concurrence très inégale avec les grandes entreprises or le CIR continue à subventionner les grands groupes comme les PME. Prendre la mesure de ces deux enjeux, celui du risque particulier auquel est confronté le chef d'entreprise, celui de la difficulté d'accès aux compétences constituerait un premier pas vers la reconnaissance légale de l'entrepreneur.
Olivier Passet, Définir l'entrepreneur : un impératif stratégique, une vidéo Xerfi Canal
Publié le jeudi 13 juin 2013 . 4 min. 50
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