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La conférence Transformation digitale et frénésie financière organisée par Xerfi le 5 avril 2018, nous invite à nous replacer dans le temps long et souvent lent de l’histoire. Celui  des inerties sociales et institutionnelles. Les différents intervenants ont su nous parler véritablement de la transformation des choses, non de cette fameuse disruption qui échauffe tant les esprits.


Cette transformation touche d’abord les relations interindustrielles. Le digital c’est de nouvelles possibilités d’assemblage des produits, des services et des organisations. Cette recomposition, n’efface ni le travail, ni le salariat, ni l’État. Derrière cette évolution, la finance joue un rôle tout autant de perturbateur que d’accélérateur.


Du régime de croissance qui émerge, je dirais


1/ Qu’il nous fait franchir un nouveau stade de complexité et d’interdépendance des produits et des organisations. En ce sens, il s’inscrit dans le fil de l’histoire du développement économique social et humain. Et ouvre une perspective au capitalisme, autre que celle de la décroissance ou celle déprimante de la stagnation séculaire, dont Natacha Valla nous dit qu’il s’agit finalement d’un ressac du cycle financier, en attendant la prochaine vague.


2/ Ce régime, bouscule les rapports de force entre agents. Il a de lourds effets redistributifs. Il fera des perdants a dit Xavier Ragaud.  Et comporte de gros risques de déséquilibres. Entre capital et travail, entre régions du monde, avec notamment tout ce qui nous a été dit par Thierry Philipponnat sur les risques de concentration de la rente technologique sur quelques acteurs hyper-dominants, les fameux GAFAM entre autres.


3/ Il va falloir compter encore, selon Elisabeth Grosdhomme et Philippe Askenazi avec le travail, son organisation, le besoin de  fidélité et de réciprocité dans la relation d’emploi, et mobiliser l’outil numérique, en matière de formation et de reconnaissance des compétences, loin des phantasmes libertariens de certains.


4/ Ce régime, n’a certainement pas encore trouvé les conventions de valorisation et de formation des prix stabilisantes. Nous vivons dans un régime d’arbitraire concernant la valorisation de l’immatériel, notamment du capital immatériel. Il est possible aussi, que le hold-up qu’opèrent les entreprises sur les données, nouvelle matière première essentielle, ressemble à celui qu’elles ont longtemps opéré sur les énergies fossiles. Tout cela participe aux biais de distribution, aux désordres de la finance, et probablement aussi à de grosses erreurs de mesure et de pilotage macro-économiques.

Alors comment favoriser et assagir tout cela ? Je surlignerais deux points, l’un concernant le travail, l’autre le capital.


Concernant le marché du travail, je retiendrai d’abord de ne pas trop vite nous engouffrer dans les lubies et les raisonnements pavloviens de l’époque. Ceux d’un côté qui spéculent sur la fin du travail, et voit pour seule issue le revenu universel. Ceux de l’autre, qui prophétisent la fin du salariat, un free-lance, un travail à la tâche généralisé. Pour, au nom de l’agilité, continuer à dérèglementer comme on le fait depuis 30 ans. Il est urgent au contraire de consolider les conventions de distribution primaire du revenu, avant même de penser à la redistribution, au social donc. Cela passe par un travail de redéfinition, de cartographie, de traçage des compétences évoqué tout à l’heure. Peut-être aussi par un réexamen du contrat implicite qui relie les plateformes à leurs utilisateurs concernant l’exploitation gratuite des données. Ce que j’ai entendu, c’est que nous avons besoin de reformaliser les choses. Ce qui ne veut pas dire de considérer le code du travail comme un catéchisme intouchable. Mais il semble illusoire de croire, que dans le monde de la connectivité, seul le droit aurait vocation à se simplifier.


Concernant, le capital, je ne surlignerai que 2 choses 1/ il est clair que ce qui a été dit sur le cycle financier, nous invite à canaliser la finance. Sa pro-cyclicité affaiblit nos potentiels de croissance. Il faut repenser la fonction des banques centrales, en ayant conscience que le régime de faible inflation, est durable. Il tient à une multitude de facteurs : notamment à la pression des acteurs à coûts fixes et à l’extraordinaire pouvoir de mise en concurrence des plateformes, et au fait que les goulets d’étranglement sont de moins en moins prégnants dans nos économies dématérialisées. Le rôle des banques centrales, c’est moins la sacro-sainte cible d’inflation, et bien plus la canalisation du cycle de crédit, le traçage des circuits de l’ombre, et la maîtrise de l’inflation des prix d’actifs. 2/ Il faut sortir de la schizophrénie entre finance et économie réelle. La première sphère vit dans l’euphorie de l’abondance du capital. La seconde, nous est dépeinte par la comptabilité nationale comme anémiée, sans ressort d’innovation. Et pour cause, sur les marchés financiers, le capital immatériel est bien reconnu. Il fait l’objet de toutes les spéculations. Alors que dans l’autre, celui de la comptabilité nationale, il est peu ou mal évalué. Ce qui participe très probablement à une forte sous-estimation de la croissance et de la productivité. Il y a là un déficit patent de conventions de valorisation qui déboussole le pilotage de nos économies et prête à toutes les spéculations.


Mais puisque Pierre Veltz nous a invité à reconsidérer les enjeux de compétitivité en sortant du champ étroit de l’industrie, j’aimerais le prendre au mot. Et en tirer quelques conséquences dans le cas français.


Nous pouvons sur la base de sa vision élargie de l’industrie, tirer un constat plutôt positif concernant l’économie française, et aborder la transformation digitale en prenant appui sur nos spécificités.  Si la France n’est plus une puissance industrielle, elle peut prétendre pour le moins être  une puissance hyper-industrielle. L’érosion de notre base industrielle au sens étroit est infirmée lorsque l’on étend l’observation aux secteurs des utilities, de l’information et de la communication, et à toute la sphère des services à l’industrie (l’ingénierie, la R&D, le conseil, la logistique etc.), voire le commerce de gros, le transport. Le poids de ces secteurs de plus en plus intégrés, dans l’ensemble de la valeur ajoutée résidente, est croissant.


Et la France exporte déjà plus de services que de biens, si l’on tient compte des services qu’incorporent les produits.


Et ce repositionnement hyper-industriel français est encore plus manifeste lorsque l’on ajoute à nos exportations le chiffre d’affaires produit par nos filiales implantées à l’étranger. Cette extension de l’économie française, est source de revenus considérables et constitue une modalité clé de captation de la demande étrangère. Elle employait fin 2015, presque 5,8 millions de personnes. Ce qui représente, près de 30% des activités marchandes installées sur le territoire. Et là encore, la suprématie des activités de services est manifeste : 3,5 millions de personnes, soit nettement plus que l’Allemagne ou que le Royaume-Uni. 


Ce prisme permet de mettre en avant d’autres positionnements stratégiques pour penser la compétitivité française : le commerce de détail, l’hébergement et la restauration, les activités scientifiques, l’ingénierie, le conseil, la programmation informatique, la communication, l’assurance. Autant de points forts de l’économie française qui compensent pour partie nos pertes industrielles.


C’est donc comme une nation spécialisée dans les services et exportatrice de service qu’il faut regarder la France et affiner le diagnostic de sa compétitivité.


Et c’est là qu’il faut s’inquiéter sans doute de la dégradation brutale du solde des services que pointe notre balance des paiements depuis 2014. Elle touche la plupart des positionnements que j’ai mentionnés plus haut. Or, ces secteurs ont tous un point commun. Ils sont surexposés à la grande transformation numérique qui bouleverse les modèles d’affaires. Et notamment à la menace de captation hégémonique de la valeur par les GAFAM. C’est ce combat là qu’il nous faut gagner, à l’heure de l’hyper-industrialisation des services. Au risque d’être submergés par une nouvelle vague de régression de notre base productive. Or sur ce terrain, ni les lois travail, ni la rhétorique de l’agilité, ni les démonstrations de la French tech au Las Vegas consumer show ne sont à la mesure de la menace. Tout ne jaillira pas de la libération des initiatives, de la relève du vieux monde par les start-up ou les licornes. Tout laisser à l’initiative du marché menace aussi la biodiversité et la capacité des pays challengers à entrer dans la vague numérique et à en capturer la valeur. Vu l’état du rapport de force initial, il y a un vrai risque de vassalisation numérique.


A l’heure où le digital rebâtit les grands écosystèmes de la mobilité, de la santé, du loisir, de la sécurité, de l’éducation etc. ce sont les armes lourdes de la politique industrielle auxquelles il faut sans doute songer. La France se retrouve au fond dans les mêmes problématiques de rattrapage que celles qui ont prévalu après-guerre. Qui nécessitent de l’argent public dédiés aux grands investissements, et des barrières tarifaires et non tarifaires pour protéger les industries, je devrais dire les écosystèmes naissants.


Pour conclure, puisque l’un des gros enjeux du digital, c’est de bâtir des écosystèmes, de capter des actifs, et de la valeur par croissance externe, j’aimerais rappeler 1/ que la France est un pays de multinationales, qui a démontré jusqu’ici un certain savoir-faire dans l’alliance de la finance et de la stratégie d’entreprises. 2/ qu’elle a déjà un pied dans l’hyper-industrie. Et même si elle est en position de rattrapage, l’histoire a montré que l’État savait piloter ce genre de processus 3/ La transformation digitale comporte de gros risques sociaux…. Et dans ce contexte, disposer d’un état social robuste comporte aussi des avantages. Bref, pour prendre pied dans ce nouveau régime de croissance, la France dispose aussi d’atouts.


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