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La sobriété est dans toutes les bouches. Les politiques et les institutions internationales s’en sont emparés. Mais en même temps qu’il s’est vulgarisé, nous assistons à un véritable brouillage du message. Voici que la chasse au gaspi initiée par le gouvernement pour affronter les pénuries temporaires du conflit ukrainien est qualifiée de « plan de sobriété ». Voici que l’OCDE s’empare du terme pour évoquer tout ce qui vise à diminuer l’empreinte carbone de nos sociétés. Ce brouillage voile en fait la profondeur de la remise en cause de notre régime de croissance à laquelle engage la sobriété.

Des investissements pour diminuer l’empreinte carbone

Si la sobriété est juste une chasse au gaspi, essentiellement circonscrite au chauffage des bâtiments ou limitant les transports par le télétravail ou le covoiturage, pour préserver les usages industriels, son impact sur la croissance est très limité :

1. il s’agit essentiellement d’économiser des ressources fossiles que nous importons, avec un impact dérisoire sur le PIB ;
2. ces économies ciblées libèrent de surcroît du revenu disponible qui sera réaffecté à d’autres postes de consommation avec éventuellement un effet positif sur la croissance s’il s’agit de services ancrés sur le territoire.

Si la sobriété englobe tous les investissements que les pays engagent pour diminuer leur empreinte carbone (isolation thermique, développement des énergies renouvelables ou nucléaires), là encore, elle ne pose pas de question existentielle au capitalisme. Le déclassement naturel ou accéléré de technologies carbonées et le renouvellement du capital ancien par du capital nouveau s’inscrivent dans la marche même du capitalisme. On peut lui appliquer une lecture schumpetérienne de type destruction créatrice, qui est précisément ce qui a permis jusqu’à ce jour au système de sans cesse se régénérer et de se réinventer. Surmontant l’entropie liée aux rendements décroissants et aux excès de la concentration.

La sobriété carbone apparaît même à certains égards comme une aubaine pour les entreprises, puisqu’elle ne cesse de démultiplier les nouveaux besoins : rajoutant une couche de coûts dans le bâtiment, d’expertise et de cahiers des charges coûteux dans les entreprises confrontées à la RSE, conduisant à relocaliser tout un pan de la production d’énergie que nous importions massivement jusqu’ici. Ou encore appelant à remplacer notre parc de machines et de voitures. On arrive alors assez aisément à démontrer dans ce cadre que la sobriété non seulement nous fait économiser des ressources, mais qu’elle nous permet en outre de développer de nouveaux débouchés. C’est tout le discours véhiculé par les tenants de la croissance verte. Et le capitalisme financiarisé, devient même le système le mieux à même d’organiser son financement sans drame.

Limiter les fins

Sauf que le sens du mot est dévoyé. Car la sobriété, c’est à la fois beaucoup plus que la chasse anti-gaspi et beaucoup moins que ce qu’entend l’OCDE à travers la sobriété carbone. Jean-Marc Jancovici est très éclairant sur ce point. La sobriété, c’est abandonner délibérément et de façon organisée, des services, des flux physiques, des usages… Consommer ou s’équiper moins donc. Précisément, parce que le concept dont se différencie la sobriété, celui d’efficacité énergétique, ne fait pas le job. L’efficacité énergétique étant toutes les solutions qui permettent de produire autant ou plus à moindres émissions. Ainsi, investir dans l’isolation, c’est de l’efficacité, c’est pouvoir se chauffer autant à moindre consommation énergétique. Développer l’éolien, le solaire ou le nucléaire, c’est produire autant ou plus en substituant des technologies à d’autres, etc. On est sur le terrain de l’optimisation sur lesquels les économistes sont à l’aise. Et de la confiance dans le progrès technique et le pouvoir des signaux prix pour rationner le carbone.

Or, c’est cette double confiance que torpille le concept de sobriété :

1. Premièrement, le capitalisme ne dispose pas des ressorts internes pour préserver la biosphère : l’innovation non seulement ne solutionne pas tous les abus, mais parfois les aggrave, à l’instar du digital, ou anime l’appétit consumériste à grand renfort de marketing.
2. Deuxièmement, contrairement à ce que revendique la science économique, il ne s’agit pas seulement d’économiser ou réallouer les moyens, pour préserver le climat, mais aussi de rationner les fins, déplaçant la contrainte de rareté sur les usages humains.

Cette idée torpille le fondement même du calcul économique, dont la vocation est d’optimiser les process pour satisfaire des fins sans cesse renouvelées et augmentées. Économiser les facteurs, cela nous savons le faire. C’est le but même du calcul économique. Limiter les fins. Non. Et dans un capitalisme financiarisé, où tout le métabolisme du financement repose sur les promesses de création de valeur, de plus-values incessantes, la sobriété pose une vraie question existentielle.

On aimerait que la sobriété ne soit qu’une chasse au gaspi assez indolore et l’aiguillon d’une créativité porteuse d’emplois et de croissance. Mais vraisemblablement c’est plus que cela. C’est ce que nous devrons accomplir par moins de croissance si l’efficacité n’est pas au rendez-vous. Et c’est la dose qui en fera un poison ou non pour le capitalisme.


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