Xerfi Canal présente l'analyse d'Olivier Passet, directeur des synthèses économiques de Xerfi
La France et son record ou quasi-record mondial de dépenses publiques. La France et ses 5 ou 6 millions de fonctionnaires. La France et son trop plein d'impôt. La France trop administrée, trop socialisée, ankylosée alors que la mondialisation exige toujours plus d'agilité, de réactivité. Voilà le tableau noir qui a presse aujourd'hui et qui assombri jour après jour la perception que nous avons de notre modèle en sursit.
Et face à cela que voit-on ? Un exécutif qui met certes le cap sur la rationalisation des dépenses, qui promet 15 milliards d'économie cette année, 15 milliards par rapport à un scénario de hausse spontanée de 20 milliards en fait, 15 milliards qui sont 5 milliards de hausse en définitive. Un exécutif qui attaquerait donc à la petite cuillère l'océan de nos dépenses inutiles.
Notre obésité serait-elle en train de virer à la paralysie ? On peut se le demander. Mais le discours dont que je me suis fait quelque temps le porte-parole, est en définitive, si outré, si décalé de la réalité, qu'il devient contre-productif. Il n'est pas entièrement faux, mais il est formulé de façon tellement excessive qu'il ne peut avoir prise sur la décision ; il nous détourne surtout des actions véritablement efficaces.
La question n'est pas de faire revenir nos dépenses publiques dans la moyenne de l'OCDE, soit 14 points de PIB d'économie (280 milliards) ou dans la moyenne UE ce qui signifierait 140 milliards de coupes. L'enjeu véritable est, tout en respectant nos grandes options collectives, de promouvoir une plus forte efficacité de nos dépenses. Une rationalisation d'autant plus indispensable que l'on reste attaché à une certaine conception de l'assurance et du partage des risques.
Alors regardons d'abord les dépenses de fonctionnement qui sont sous le feu de tant de critiques. Si l'on en juge par la masse des rémunérations versées par l'état, la hiérarchie est défavorable à la France. L'Etat français est au sommet de la hiérarchie en compagnie des pays nordiques et 2,5 % du PIB au-dessus de la moyenne européenne. Avec un renouvellement d'un fonctionnaire sortant sur deux, l'emploi public pourrait en théorie diminuer d'un quart en 10 ans, et c'est plus qu'il n'en faut pour revenir dans la moyenne. Mais on le sait aussi, ce type de politique, bute sur le fait que l'Etat n'est pas en sureffectif partout. Trop de services généraux certes au sein des grandes fonctions de l'éducation, de la santé notamment. Mais sur les c?urs de métiers les fonctions ne sont pas si généreusement dotées. Une approche trop mécanique peut dès lors vite buter sur des goulots d'étranglement.
Surtout, on oublie trop souvent de mentionner que les pays qui incarnent la réussite en matière de réforme de l'Etat, ont basculé une grande partie de ces dépenses sur des organismes et agences périphériques que l'impôt finance. Je vous recommande les études d'Annick Guilloux en la matière. Les rémunérations publiques basculent sur les consommations intermédiaires. A regarder plus complétement les dépenses de fonctionnement, rémunération + consommations intermédiaires, la position française est bien moins excessive qu'on ne le dit souvent. L'Etat français rémunère beaucoup et sous-traite peu. Mais en définitive son budget de fonctionnement est de façon inattendue inférieur à celui du Canada, de la Suède ou du Royaume-Uni.
Que voit-on en définitive ? Les grands exemples de rationalisation qui nous sont si souvent donnés en exemple sont des pays qui ont au mieux réussi à converger vers le niveau français partant de niveaux bien plus élevés.
Conclusion, on peut toujours moderniser nos modes de gestion, l'économie à attendre sera marginale. Et en définitive, c'est bien du côté de nos grands arbitrages sociaux que se situent les vraies zones d'économie.
Olivier Passet, Peut-on vraiment contracter la dépense publique en France ?, une vidéo Xerfi Canal
Publié le jeudi 17 octobre 2013 . 4 min. 16
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