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Le Brexit entrera en vigueur le 29 mars 2019. C’est un sujet d’inquiétude d’abord pour les français vivant au Royaume-Uni. C’est ensuite une source d’incertitude pour les entreprises implantées outre-Manche et pour celles qui exportent sur le marché ou dépendent de sous-traitants britanniques.

 
On sait que c’est la dernière ligne droite. Que 95 % du dossier serait bouclé. Que la question irlandaise reste un point d’achoppement, et que même si un accord est obtenu à Bruxelles, demeure un gros risque politique autour de sa validation au Parlement britannique ou auprès de la population par référendum. Bref, la perspective d’un scénario d’un hard Brexit continuera à planer encore assez longtemps, même en cas d’accord au sommet.

 

Négociations UK/UE : le jeu du Poker menteur

 
A ce stade, nous en sommes au grand Poker menteur où chacun exploite le risque d’un no deal que personne ne souhaite. Difficile dans ce contexte de surenchère de pondérer le risque réel d’un no deal. Le plus probable, c’est que nous ne serons ni dans le hard, ni dans le soft, et que sur nombre de points sensibles, il se pourrait bien que le temps de la négociation soit allongé. Car chacun sait que Bruxelles est passé maître dans l’art de jouer les prolongations en sous-marin et de transgresser ses propres règles.

 
Mais en dépit de cette grand-voile de fumée, il y a des choses que l’on sait déjà. Même en cas de soft Brexit, la zone de libre-échange ne sera que partiellement préservée. Comme d’autres pays en dehors de l’UE, la Norvège, la Suisse, la mise en conformité avec les directives du marché unique, et l’union douanière souffre de vastes domaines d’exception. Même le cas du Brexit soft, c’est une « zone de libre-échange à la carte » qui sera mise en place, encadrée par un « ensemble de règles communes pour les biens et les produits agroalimentaires ». Les nouvelles normes concernant les marchandises seraient élaborées en commun entre l’UE et le Royaume-Uni, qui resterait membre des agences de régulation des secteurs très encadrés (chimie, médicaments, aviation). Il quitterait a minima les politiques européennes communes en matière d’agriculture et de pêche.

 
Un soft Brexit se traduira aussi par retour au contrôle de la politique migratoire. Cela ne devrait pas affecter les 3 millions d'Européens vivant déjà au Royaume-Uni et le million de Britanniques résidant sur le continent. Ces derniers conserveront les mêmes droits une fois que le Royaume-Uni aura quitté l'UE, d’y faire des études ou de travailler. Mais le système sera filtré. Si les plus qualifiés ne devraient pas rencontrer de problèmes pour obtenir titres de séjour et permis de travail, il est clair que pour les moins qualifiés et pour les non-citoyens de l’UE, l’impact sera lourd.

 
Le gouvernement aspire aussi à un dispositif permettant aux citoyens britanniques et de l’UE de continuer à voyager dans les territoires des uns et des autres. Peu de chance de voir revenir un système de visa donc, et un choc frontal concernant le tourisme.

 

Pas de rupture radicale

 
Ce que devrait contenir l’accord, c’est très probablement, un régime beaucoup moins favorable pour la City. Il n’y aura ni passeport ni reconnaissance mutuelle. Autrement dit, après accord, les institutions financières qui veulent continuer à prester des services sur le continent, devront avoir des implantations sur le continent. Revers de la médaille, la City renforcera son attractivité règlementaire (autrement dit l’assouplissement des règles prudentielles) pour contrecarrer l’impact sur l’emploi.

 
Le Brexit va donc changer la donne. Le scénario du hard Brexit est certes plus violent, mais il ne signifie pas nécessairement à terme un schéma fondamentalement différent du soft Brexit. Seulement, il exigera une multitude d’accords bilatéraux pour maintenir une fluidité des échanges entre le Royaume-Uni et l’Europe continentale.

 
Ce que l’on sait enfin, c’est que dans tous les cas le Brexit ne prendra pas la tournure d’une rupture radicale. Le processus s’étirera a minima jusqu’en janvier 2021, maintenant une continuité des règles et laissant un espace à la négociation des accords bilatéraux. Et l’on évoque déjà une prolongation d'un an, soit jusqu'au 31 décembre 2021… Personne n’a intérêt au chaos, et les parachutes sont déjà prêts.


Publié le lundi 29 octobre 2018 . 4 min. 51

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