Faut-il travailler plus pour payer moins… d’impôt ? S’opposant aux hausses d’impôts du gouvernement Barnier pour réduire le déficit, Gérald Darmanin assure : « Le problème de la France est la dépense sociale et le fait que l’on ne travaille pas assez. » Alors le déficit public est-il le produit d’un déficit de travail ?
C’est le sujet de mon billet libéral.
D’abord les faits.
Les faits sur la dépense sociale. En France, elle représente un tiers du PIB, contre 27 % en moyenne en Europe – c’est un record dans le club des pays riches de l’OCDE. Au sein de cette masse, les retraites pèsent la moitié, 2,5 points de plus que la moyenne européenne.
En clair, impossible de réduire le niveau record de dépenses publiques sans s’attaquer à la dépense sociale.
Maintenant, les faits sur le travail. Après la Finlande, la France est le pays européen où la durée annuelle effective de travail des salariés à temps complet est la plus faible : 1 668 heures. C’est 122 heures de moins qu’en Allemagne, soit l’équivalent de trois semaines de travail.
Regardons maintenant le taux d’emploi, c’est-à-dire le nombre de personnes au travail rapporté au nombre de personnes en âge de travailler. Il est de 69 % en France, contre 77 % en Allemagne et même 82 % aux Pays-Bas. Nous payons deux anomalies: les jeunes et les seniors sont en proportion davantage exclus du marché du travail qu’ailleurs en Europe.
Et maintenant, le lien entre les deux. Prenons la réforme des retraites. François Ecalle, expert des finances publiques passé par la Cour des comptes, explique : « Le principal intérêt du recul de l'âge de départ est d'augmenter la population active et donc, finalement, d’accroître l'emploi et les capacités de production. Cela fait des recettes en plus pour toutes les administrations publiques, pas seulement les régimes de retraite, mais aussi l'État, les collectivités locales et plusieurs branches de la sécurité sociale. Y renoncer représenterait un très gros manque à gagner pour les finances publiques. »
Lors du vote du report de l’âge de départ à 64 ans, l’exécutif n’a pas su faire la pédagogie macro-économique de sa réforme. Elle visait à faire travailler davantage les Français pour sauver leur modèle social.
Car davantage de travail, c’est plus de cotisations sociales et plus d’impôts. Autant dire qu’accroître la quantité de travail est un moyen – vertueux – de redresser les finances publiques.
C’est aussi briser cette logique infernale consistant à soutenir le niveau de vie par la distribution de primes, subsides et autres allocations. Un paradis artificiel puisque ce soutien est payé à crédit et vient alimenter une dette devenue hors de contrôle.
Les services de la direction du Trésor se sont livrés à un exercice théorique très instructif. Ils se sont demandé quels seraient les effets budgétaires d’un alignement du taux d’emploi français sur celui de l’Allemagne?
La réponse tient en trois chiffres.
Ce choc correspondrait pour la France à la création d’un million et demi d’emplois.
Cet alignement augmenterait les recettes de protection sociale d’environ 15 milliards d’euros via notamment les cotisations sociales et la CSG. Il abaisserait les dépenses de protections sociales d’environ 5 milliards d’euros via cette fois la baisse des dépenses de prestations sociales et les moindres revenus de remplacement versés.
Voilà notre slogan validé : travailler plus pour payer moins d’impôts !
Publié le mercredi 13 novembre 2024 . 4 min. 15
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de Rémi Godeau
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