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L’échec est sur le point de devenir une idée à la mode. Un peu comme a pu l’être le suicide des jeunes hommes en Allemagne au XIX siècle après la publication des Souffrances du jeune Werther de Goethe. Ce qu'un sociologue américain a appelé le suicide mimétique.

Les adeptes du développement personnel n'hésitent pas à nous parler des vertus de l'échec. Il y est question (je cite) de «  réussir nos échecs ». Car il n’aura échappé à personne que (je cite toujours) chaque épreuve, parce qu’elle nous confronte au réel ou à notre désir profond, peut nous rendre plus lucide, plus combatif, plus vivant. » Diantre ! Comme s’il fallait absolument tout positiver. Et comme si l’échec était non pas seulement une épreuve à traverser mais un must have. Un peu comme la dépression nerveuse ou le burn out en somme. Ceux qui n’ont pas connu ces épreuves n’ont pas vécu pardi. Comme si l’on pouvait parler du syndrome de la vie bien ratée ou du moins du bon ratage.

Dans une culture obsédée par le succès, l'échec n’a évidemment plus le même sens. D’ailleurs, le sens originel de l'échec est purement commercial. On parlait autrefois d’échec pour une entreprise. Ce n’est qu’au XIXème siècle que la notion a commencé à décrire des individus. Il fallait à l’économie américaine en plein essor un terme pour étiqueter ses victimes, ceux dont on pensait qu’ils ne savaient pas profiter de la croissance économique, les laissés pour compte. Mais la définition du terme s’est considérablement élargie au vingtième siècle pour indiquer les mauvais payeurs, ceux qui se montrent incapables de régler leurs dettes. Et puis on a commencé à l’appliquer à ceux dont la vie patine dans l'obscurité de la routine. « Pire qu'une simple déception, l'échec expose nos rêves à des impasses », comme le rappelle Joe Moran auteur d’un livre sur le sujet. Plutôt que de nous renvoyer éternellement à nos ratages, le capitalisme a fait de l’échec une arme de combat. Car de l’échec nous pourrons toujours nous remettre et nous relever gonflés de sagesse et d’enthousiasme. A l’image de cet ancien patron de radio qui proposait de tomber sept fois et de se relever huit. L’échec ne serait plus dès lors un point, mais plutôt un point-virgule ; une sorte de tremplin sur la voie du triomphe ; un trébuchement dont nous nous relevons prêts comme le rappelle cette missive de Richard Branson, « Essayez à nouveau. Échouer à nouveau. Échouer mieux". Des mots d’ailleurs empruntés à Samuel Beckett, mais qui, comme le dit Branson« auraient tout aussi bien (pu) sortir de (sa) bouche». Ce que veut dire Becket, dont l’échec traverse effectivement toute l’œuvre, c’est qu’étant notre lot commun, il faut accepter son inévitabilité. Et non pas tenter de surmonter la défaite. Le trait de génie de Branson est ici de s’inspirer d’un auteur dont le prix Nobel n’est pas franchement attribuable à son sens de la rigolade, pour en faire un devise qui relève davantage de la psychologie positive. Comme quoi le capitalisme est même capable de transformer l’absurde en une marchandise monétisable. C’est dire à quel point il est indépassable.

Admirons cette grande force (à moins que ce soit une farce) qui consiste à inverser les polarités en s’appropriant une idée qui lui est irréductiblement étrangère pour la faire sienne après l’avoir mâchée et digérée. En d’autres termes il s’agit de transformer une idée en son contraire. Ainsi en est-il du yoga, de la culture punk et de manière générale de tout ce qu’il est convenu d’appeler la contre-culture. Rien ne se vend mieux que l’esprit rebelle à partir du moment où il a été digéré par le capitalisme. C’est pourquoi on parle souvent de capitalisme cognitif alors que l’on devrait plutôt parler de capitalisme digestif. Non seulement le capitalisme s’approprie tout ce qui se trouve sur son passage, mais en plus il parvient à en inverser la signification pour se renforcer. C’est pour cette vertu purement digestive que le capitalisme a de beaux jours devant lui.


Référence :


Joe Moran, If you should fail. A book of solace, Viking, 2021


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