Comme tous les managers, si je vous dis CA, ROI, GRC, UX, GPEC… La liste est longue, vous comprenez à quoi je fais référence. Mais, pourquoi choisir d’abréger des expressions et des groupes de mots en entreprise ? Spontanément, vous avez envie de répondre : « pour transmettre le plus d’information possible dans un minimum de temps et d’espace ! ». Mais, est-ce vraiment les seules raisons ?
Tout d’abord, il convient de distinguer le sigle de l’acronyme. Dans le premier cas, il s’agit de retenir les initiales d’une expression ; la longueur est généralement entre 3 ou 4 lettres, comme dans les exemples mentionnés précédemment ; et leur lecture passe par l’énonciation de chacune des lettres, comme D-R-H ou P-D-G.
Dans le cas de l’acronyme, seuls les mots lexicaux sont sélectionnés, dit autrement, les petits mots grammaticaux comme « à / de / et » sont oubliés ; et les mots retenus peuvent être réduits à la première lettre ou à une syllabe. C’est le cas par exemple du DAF, de l’EBITDA ou de l’AFNOR. Cela devient alors un mot unifié que l’on prononcé à l’oral comme n’importe quel mot ordinaire, et à l’écrit, il n’y a pas du tout de points abréviatifs. Ce mot acquiert une certaine autonomie, même si les mots à l’origine de l’acronyme évoluent, comme dans le cas du mot GAFAM, où, par exemple, le F de Facebook devrait être un M pour Meta.
Dans tous les cas, ces sigles et acronymes témoignent d’une créativité lexicale.
Une fois ceci posé, on peut mettre en avant plusieurs raisons à l’utilisation de ces abréviations, en sus de l’argument consistant à dire que cela favorise la facilité et l’efficacité de la communication tout en diminuant l’effort de l’articulation.
Premièrement, l’abréviation résulte d’une volonté claire de trier des lettres et des syllabes, pour sélectionner des éléments et en exclure d’autres. Dit autrement, les personnes qui proposent ces abréviations font le choix de désigner un groupe de mots différemment de ce que le « non initié » comprend.
Cela me conduit à la deuxième raison. L’utilisation des abréviations, qui font partie d’un jargon et d’un vocabulaire spécifique à une communauté, permet de montrer l’appartenance au groupe et sa légitimité à être à sa place dans l’entreprise. Cela traduit donc un lien social et distingue « l’expert » du « profane ». Les sigles et acronymes peuvent dès lors permettre à des personnes de se rapprocher ou de s’opposer.
Troisièmement, l’abréviation peut être comprise comme l’expression politique de ce que les auteurs veulent comme représentation d’un sujet, voire d’eux-mêmes, lorsqu’il s’agit notamment d’une marque. C’est ainsi qu’ils construisent un mot, une forme, un sens pour séduire en retenant des sonorités agréables, qui peuvent provenir d’une autre langue.
Pour conclure, rappelons toutefois que les mots étant cachés, les personnes peuvent oublier de quelle réalité on parle. Il serait dès lors certainement pertinent de prendre le temps de prononcer régulièrement l’entièreté des mots, en pleine conscience de qu’ils signifient.
De plus, une abréviation ouvre un nouvel espace de réflexion. C’est ainsi que le DRH peut être le Directeur, non pas des ressources humaines, mais des « richesses humaines ».
Les abréviations sont donc bien plus que des raccourcis en entreprise pour aller toujours plus vite.
Ils sont aussi l’expression d’une approche politique de la communication en management !
Publié le vendredi 17 mai 2024 . 4 min. 17
Les dernières vidéos
Management et RH
Les dernières vidéos
de Bérangère Szostak
LES + RÉCENTES
LES INCONTOURNABLES