Ce qu’on pourrait appeler la loi du tonneau percé peut être résumé ainsi : plus les connaissances sur le travail progressent par le truchement des sciences du travail (ergonomie, gestion, sociologie et psychologie du travail, clinique du travail, économie du travail…), plus les erreurs managériales se répètent.
C’est tout le paradoxe d’un management qui avance à reculons ou comme disait Alfred Sauvy « tous freins serrés ». Le savoir s’accumule donc, mais il ne pénètre pas vraiment les pratiques. Comme un tonneau percé : on remplit, mais rien ou presque ne reste.
Parmi ces croyances, ces superstitions et ces erreurs qui se répètent, on peut citer :
L’homme est une ressource.
Il suffit de bien prescrire pour bien faire.
Le sens se donne.
La culture se manage.
La transformation se décrète.
La fragilité est antinomique avec la qualité.
Un ordre social efficace dans le temps et l’espace peut être planifié.
Un bon manager sait tout et décide de tout.
Le leadership, c’est le charisme.
Le management est une somme de techniques.
La formation rend compétent.
Le bien-être précède le bien faire.
La discussion suffit pour faire émerger une intelligence collective.
Ce qui est efficace est vrai et juste.
On peut planifier à l’avance et totalement les compétences nécessaires pour faire face à une situation de travail.
L’IA peut résoudre les problèmes de management.
Il y a une force intrinsèque dans les idées vraies.
Etc.
Vous comprenez donc pourquoi nous bricolons dans l’incurable depuis plusieurs années. Il me semble que nous avons oublié qu’il n’y a pas de bonne gestion ou de bon management sans infrastructure morale, culturelle et politique comme le disait déjà un des premiers consultants français de l’après-guerre Octave Gelinier.
En effet, d’une part, les techniques seules ne suffisent pas à penser et à accompagner la mise en œuvre des conditions nécessaires pour une performance soutenable. D’autre part, les idées vraies ne suffisent pas pour transformer à bon escient car les relations de pouvoirs sont toujours tapies dans l’ombre.
Nous avons donc intérêt à passer d’une stricte formation au management à une éducation au management, laquelle ne s’intéresse pas exclusivement aux techniques mais aussi à l’Homme du savoir.
En effet, nous avons beaucoup produit de « lois » pour les objets mais parallèlement, nous avons négligé les règles pour le sujet comme le mettait en exergue, jadis, Gaston Berger.
C’est pour cette raison que je m’associe aux chercheurs contemporains qui pensent qu’il est temps de passer, en ce qui concerne le «management, d’une « épistémologie de la production » à une « épistémologie de la réception » car « les bonnes idées sont sans valeur, ce qui compte, c'est celui qui les a » (Kraus). C’est un truisme de le dire.
Publié le mercredi 28 mai 2025 . 3 min. 27
Les dernières vidéos
Management et RH




Les dernières vidéos
d'Ibrahima Fall




LES + RÉCENTES


? Flavien Vottero 10/07/2025


LES INCONTOURNABLES


