Le Bore Out : ces salariés zombies détruits par l'ennui

Un grand tabou de la vie au travail est l’ennui.

Autant, le burnout est au centre de beaucoup de préoccupations quand on se penche sur les Risques Psycho-Sociaux, autant son contraire le « bore out » qui décrit une détresse psychologique par l’ennui, reste un déni du monde du travail.

Pourquoi ?

Parce qu’il n’est pas glorieux d’admettre que des salariés sont employés à ne rien faire, ou pas grand-chose.

Cela renvoie à une activité atone, un manque de dynamique, ou à des pratiques de GRH très suspectes, avec la création d’emplois bidons.

Et pour les salariés concernés, c’est la honte de se sentir inutile et de ne pas contribuer à l’activité de leur entreprise, car le travail (et son corollaire l’emploi) reste un marqueur identitaire fort de nos sociétés.

Le Bore out a été étudié dans les années 2010 par des chercheurs comme Bourion, Bataille, Trébucq, qui le définissent comme « un épuisement professionnel par l’ennui au travail » (bore out en anglais signifie « s’ennuyer »). Concrètement, quand un collaborateur fait face  à une sous-charge d’activité de façon chronique.

A cette sous-charge d’activité, s’ajoutent souvent le manque de sollicitations par les collègues ou la hiérarchie, comme l’absence de défis professionnels. Ces salariés se décrivent comme des « zombies professionnels ».

Le syndrome du Bore Out s’installe en 4 étapes :

- La première est l’espoir. Le salarié constate l’absence d’activité mais espère que la situation va évoluer.
- Il va ensuite prendre conscience de la pérennité de cette sous-activité et essayer de s’ajuster à cet état : travailler plus lentement, introduire des pauses, s’évader en surfant sur le Web, solliciter plus de travail.
- S’installe ensuite une phase où le salarié va perdre progressivement à la fois ses compétences puisqu’il ne peut pas les exercer et son estime de soi.
- Le bore out arrive dans la quatrième étape quand la personne n’arrive plus  à faire face à cet ennui permanent, qu’elle a le sentiment d’être vidé et complètement détruite psychologiquement.

Ces chercheurs montrent que les salariés victimes de bore out cachent leur situation car ils en ont honte. Il est en effet plus valorisant de se déclarer en surcharge de travail que d’expliquer qu’on est en détresse psychologique parce qu’on n’a pas assez d’activité. S’ajoute souvent un sentiment de culpabilité : après tout, ces salariés ont la chance d’avoir un emploi rémunéré ! « Être payé à ne rien faire » peut paradoxalement être une situation enviable dans l’imaginaire collectif.

Il reste encore beaucoup à explorer sur ce sujet sensible et très tabou : difficile en effet de dénoncer une telle situation qui risque de faire perdre son emploi !

Mais le bore out est définitivement à inscrire dans le tableau des Risques Psycho-Sociaux.