Vidéo réalisée pour l’ouvrage « Stratégie » publié par les éditions Vuibert.
On associe trop souvent le changement à sa seule partie visible et symbolique, c’est-à-dire le jour où le dirigeant annonce un changement de stratégie, marquant ainsi une rupture. Or, le changement stratégique doit être avant tout conçu comme un processus.
Kurt Lewin propose de décrire tout processus de changement en trois étapes :
• D’abord, le dégel, qui correspond à la prise de conscience par les acteurs de l’entreprise (dirigeants, actionnaires, managers…) de la nécessité de changer. Le statu quo est ébranlé. C’est une phase de maturation.
• Ensuite, le mouvement qui traduit la mise en œuvre du changement au sein de l’entreprise et se caractérise par une instabilité forte, intermédiaire entre deux phases de stabilité. Cette phase constitue une rupture, un déracinement par rapport à la situation précédente.
• Enfin, le regel marque l’ancrage du changement au plan du fonctionnement quotidien de l’entreprise, le retour à une nouvelle situation stable et à son enracinement.
La phase d’enracinement est la plus délicate car elle nécessite de transformer en routines les nouveaux modes de fonctionnement de l’entreprise concernée. Or, si l’attention de la direction est naturellement portée sur les deux premières phases, la dernière est bien souvent oubliée (en fait, on ne sait pas bien comment faire !).
Dans le même temps, les routines restent essentielles : tout ne change pas.
Les travaux d’Isabelle Vandengeon-Desrumez, publiés dans la Revue française de gestion sur le processus de changement, ont complété cette vision. Et ils distinguent clairement les actions dans les trois phases en fonction de la nature du changement, selon que celui-ci est plutôt prescrit ou construit.
Le rôle des acteurs est en effet variable selon les phases et selon que le changement est :
• prescrit, délibéré, de type haut ? bas ou Top-Down. Le leader joue ici un rôle central de visionnaire et son charisme constitue un moteur de la mise en œuvre du changement stratégique ;
• Le changement peut aussi être construit, émergent et de type bas ? haut ou bottom-up. Le leader ne dispose pas d’une vision claire et il mobilise des groupes d’acteurs, notamment la hiérarchie intermédiaire, qui vont concevoir et mettre en place le changement. Dans cette perspective, l’innovation émerge de la réflexion des groupes et est ensuite reprise par la direction qui l’institutionnalise.
Dans tous les cas, notamment dans le contexte d’hypercompétition et de crises qui caractérise certains secteurs, dans un environnement dont les dirigeants ne cessent de décrire l’instabilité et l’accélération du rythme des changements, il faut considérer que le retour à une situation stable est illusoire. Pour nombre d’entreprises, l’instabilité est devenue la règle et la stabilité l’exception !
Au changement désormais succède donc… le changement. Ceci justifie de penser de manière inclusive plutôt qu’exclusive des changements simultanément prescrit et construit, et de penser les phases de dégel, de déracinement et d’enracinement d’abord de manière dynamique plutôt que comme un processus linéaire.
Publié le mercredi 25 octobre 2023 . 3 min. 36
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