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Cette fois, la guerrre fiscale mondiale est bien déclarée

Publié le jeudi 5 avril 2018 . 6 min. 25

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Pendant que l’attention se focalise sur les problèmes d’acier et d’aluminium, un autre conflit est apparu en mars 2018 sur un domaine autrement plus important : comment taxer les multinationales du numérique ?

 

Dans un rapport remis le 16 mars dernier, l’OCDE n’a pu que constater l’absence de consensus en la matière. Avec un risque, plus général, de remettre en cause la dynamique de progrès de ces dernières années contre les pratiques d’optimisation fiscale agressive des multinationales. Un conflit sur le droit de taxer qui touche à l’essence de la souveraineté des Etats.

 

Les tensions en cours découlent en partie de la réforme fiscale votée par les Etats-Unis en décembre dernier. L’attention s’est focalisée sur les cadeaux fiscaux faits aux riches et sur la baisse du taux d’imposition des entreprises ramené de 35 à 21 % (en fait 25-26 % lorsque l’on prend en compte les taxes locales).

 

Mais le fisc américain n’est pas idiot : afin de ne pas trop perdre de recettes fiscales, en même temps qu’il diminuait le taux d’imposition des profits, il a pris des mesures pour élargir la base imposable avec un objectif clair : remettre en cause l’utilisation des paradis fiscaux par les entreprises.

 

Une première mesure prend acte du fait que les firmes délocalisent artificiellement leurs profits. Pour toutes celles dont le chiffre d’affaire est supérieur à 500 millions de dollars, le fisc taxera, d’office, la moitié des services échangés avec les filiales situées à l’étranger, à 5 % en 2018, 10 % jusqu’en 2025 et 12,5 % après ! Une taxe sur les pratiques d’érosion des bases fiscales baptisée BEAT (Base Erosion Anti-abuse Tax).

 

La loi crée également une nouvelle catégorie de revenus, les Global Intangible Low Taxed Incomes (G.I.L.T.I, qui sonne comme « guilty » le mot qui signifie coupable !), c’est-à-dire les revenus de la propriété intellectuelle sous-taxés car dissimulés dans les paradis fiscaux. Si les montants accumulés à l’étranger montrent un taux de rendement des investissements « excessifs » (en gros supérieur à 10 %), le fisc imposera un taux d’impôt minimum de 13,125 %. Un Apple, dont la Commission européenne dit qu’elle a pu être imposée à 0,05 % en Irlande, devra payer la différence entre ce taux et les 13,125 %. L’utilisation des paradis fiscaux devient d’un seul coup bien moins attrayante…

 

Surtout lorsque, troisième mesure importante, le fisc américain propose un taux d’imposition sur les bénéfices réduit pour les entreprises qui localisent leurs droits de la propriété intellectuelle (brevets, marques, logiciels, etc.) aux Etats-Unis pour les vendre à l’étranger.

 

Le pays a sérieusement changé les règles du jeu fiscal de ses multinationales. Du coup, alors que les Etats-Unis bloquaient jusqu’ici toute avancée à l’OCDE sur la remise en cause des pratiques de manipulation des prix de transfert – les prix auxquels les multinationales s’échangent des biens et des services et qu’elles manipulent pour transférer artificiellement leurs profits vers les territoires à faible taxation -  maintenant qu’ils s’attaquent au problème chez eux, ils sont prêts à avancer sur le sujet.

 

Mais l’Europe ne l’est pas. Pourquoi ? La position américaine à l’OCDE consiste à réclamer deux choses : une réflexion générale sur la taxation des firmes et une imposition fondée sur le montant de la consommation dans les différents pays. Doublement inacceptable pour l’Europe. Taxer les entreprises non pas sur leurs profits – manipulés – mais sur leurs ventes revient à privilégier une imposition dans les pays de grosse consommation (la Chine par exemple) plutôt que dans le pays d’origine des gros pays exportateurs : les gigantesques surplus commerciaux de l’Allemagne ferment la porte à tout consensus allant dans ce sens en Europe.

 

De plus, une réflexion générale va prendre, au moins, deux ans. Or, la Commission veut avancer vite spécifiquement sur la taxation des entreprises du numérique. Car la réforme américaine peut attirer la base taxable aux Etats-Unis. Car la pression de la société civile est forte et il faut une solution avant les élections européennes du printemps 2019. Car des pays (comme l’Italie) commencent à voter leur propre loi au risque d’une multiplication des initiatives locales et d’un grand cafouillage fiscal au sein du marché unique.

 

C’est pourquoi la Commission a proposé dès le 21 mars dernier un principe de taxation des services numériques à partir de la définition, innovante, d’une nouvelle base fiscale. Il s’agit d’une taxe de 3 % sur le chiffre d’affaires de services numériques lorsqu’ils permettant de réaliser des profits grâce à l’exploitation d’informations fournies par les utilisateurs, que l’entreprise soit dans un pays européen ou pas.

 

Le périmètre d’imposition est un peu compliqué. Par exemple, Facebook ou Google qui offrent des publicités ciblées grâce aux informations recueillies sont touchées, de même que les plateformes type Uber ou Blablacar mais les flux apportés à des abonnés payants (par Netflix, iTunes…) ne sont pas concernés pas plus que le commerce en ligne, même si Amazon sera concernée pour ses autres activités de services, etc. Au total, plus d’une centaine d’entreprises, seraient impliquées, et pas que des Américaines.

 

Les Etats européens suivront-ils cette proposition ? L’Irlande, le Luxembourg, Chypre, et quelques autres sont a priori réticents sur un sujet qui réclame l’unanimité… Si l’Europe décidait d’avancer, elle considère cette nouvelle taxe comme une mesure temporaire en attendant de finaliser des mesures multilatérales à l’OCDE et de mettre en place son propre dispositif de base commune consolidée.
 

Les Etats-Unis ont d’ores et déjà dénoncé la décision européenne, qui arrive à un moment de tensions commerciales, au motif que l’utilisation du numérique concernant toutes les entreprises, le secteur n’a pas à être taxé de manière spécifique.

 

Une guerre fiscale a-t-elle commencé ? Personne ne le souhaite. Mais l’inquiétude est là, pour preuve  « le G7 a établi un groupe secret sur la question » confie un expert au cœur du dossier. La diplomatie continue. Mais on voit mal aujourd’hui comment arriver à réconcilier les points de vue.


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