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Xerfi Canal a reçu Franck Barnu, Journaliste indépendant et consultant dans le domaine de l'innovation et des technologies

Après avoir décimé nos troupes depuis une vingtaine d’années, la guerre industrielle avec les pays à bas coût de main d’œuvre est sur le point de s’achever. Elle s’achève faute de combattants. Au train où vont les choses il n’y aura en effet sous peu quasiment  plus de « pays à bas coût de main d’œuvre ». Les principaux acteurs, la Chine et l’Inde ont en effet vu leurs salaires exploser. En 2000 le coût horaire du travailleur chinois ne représentait que 3% de celui des Etats-Unis. En 2015 il sera de 16%. Idem pour l’Inde. Idem, dans de moindres proportions pour la plupart des pays asiatiques, Indonésie, Philippines et même Vietnam. A ce niveau le différentiel de coût ne joue plus en la faveur de l’Asie. Les inconvénients de la délocalisation - coût de transport, qualité, délais de livraison…- prennent le pas sur l’économie réalisée. Le bas coût n’est plus assez bas.   

De récents rapports du World Economic Forum ou du Boston Consulting group ou d’Accenture, s’accordent sur ce fait. Ils constatent en particulier que désormais il devient désormais à nouveau intéressant de produire aux Etats-Unis, que la relocalisation des entreprises américaines a débuté  et que le phénomène va s’amplifier et prendra toute sa mesure à partir de 2015.  

Le rapport du World economic forum concède qu’il existera toujours des entreprises à la recherche d’une main d’œuvre pas chère, que certaines commencent à lorgner vers l’Afrique, mais souligne que l’ampleur des délocalisations n’aura plus rien à voir avec ce que l’on connaît depuis deux décennies.  

On s’en réjouira. Mais pas longtemps. Car le front de la bataille se déplace. D’une part, la Chine, bien  consciente du problème s’est déjà engagée dans une vaste politique d’automatisation, en particulier via l’usage intensif de robots. Avec 60 000 robots elle se situe aujourd’hui très loin du n°1, le Japon et ses 300 000 robots. Mais selon la fédération internationale de la robotique, la demande chinoise est aujourd’hui si explosive qu’elle devrait faire de la Chine le premier utilisateur de robots dans le monde dès 2014, si ce n’est plus tôt. Cette volonté confirme aux yeux de Alvin Kwock de JP Morgan, « que en Chine le coût du capital n’est désormais plus inférieur au coût du travail ». 

Deuxième front, la Chine affiche des plans extrêmement ambitieux en matière de développement du capital humain. Elle investit considérablement dans la formation avec l’objectif de devenir la première puissance mondiale en termes de capital humain à l’horizon 2050. C’est en tout cas ce que rapporte le professeur Zimmerman à la tête de l’Institut allemand IZA sur l’étude du travail. 

Enfin, on le sait, depuis 2011 le dernier plan quinquennal chinois ouvert un troisième front avec ses formidables ambitions en matière de développement de l’innovation et des hautes technologies. Il identifie en particulier sept industries émergentes prioritaires.  Y figurent notamment les biotech, les technologies de l’information, les nouveaux matériaux et les équipements de production avancés. L’objectif est de faire passer leur part dans le PIB de 2% en 2008 à 8% en 2015 pour atteindre 15% en 2020.

La menace est d’autant plus à prendre au sérieux que l’état chinois entend consacrer pas moins de… 1500 milliards de dollars sur 5 ans au développement de ces industries stratégiques. 

Conclusion : à l’heure où s’installe le Ministère du redressement productif, il ne faut pas se tromper de bataille. La menace des délocalisations vers les pays à faible coût de main d’œuvre s’estompe. En voici désormais une beaucoup plus terrifiante encore. Celle d’un pays, la Chine, qui s’attaque cette fois de front à ce qui semblait jusque là la seule porte de sortie des économies occidentales : l’innovation et la high tech.


Franck Barnu,  Le terrifiant plan de bataille industriel de la Chine, une vidéo Xerfi Canal



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