Aujourd’hui, les connaissances sur les inégalités professionnelles entre femmes et hommes sont conséquentes et permettent de mieux comprendre les différentes dimensions et explications de ces inégalités. Si ces connaissances n’ont malheureusement pas encore permis d’atteindre l’égalité, elles y contribuent.
Cependant, les recherches, études et analyses sur ce sujet optent généralement pour une approche consistant à comparer le groupe des femmes d’un côté au groupe des hommes de l’autre côté. Cette approche permet de mesurer les inégalités genrées de salaire, de carrière, d’exposition aux violences, etc. Cependant, cette approche repose sur le postulat que l’on peut regrouper toutes les femmes d’un côté, tous les hommes de l’autre côté. Elle tend à homogénéiser la situation des femmes et la situation des hommes dans les résultats produits, c’est-à-dire à donner l’impression que les femmes forment un groupe homogène, et les hommes un autre groupe homogène.
Or, ce n’est pas le cas. Les individus ne se définissent pas uniquement en fonction de leur genre, mais également en fonction de leur milieu social, de leur niveau de qualification, de leur origine ethnique, de leur orientation sexuelle, de leur santé, ainsi de suite. Ainsi, l’expérience professionnelle d’une femme racisée n’est pas la même que celle d’une femme non-racisée. En particulier, les inégalités professionnelles vécues par une personne ne dépendent pas que de son genre, mais aussi de ses autres caractéristiques.
Le paradigme intersectionnel nous invite donc à considérer plusieurs caractéristiques simultanément. Le terme d’intersectionnalité a été initialement proposé par Kimberle Crenshaw dans les années 1990 pour rendre compte de l’expérience des femmes racisées aux États-Unis, et ce faisant montrer les limites du féminisme classique, souvent porté par des femmes non-racisées et issues de milieux aisés.
Ce paradigme intersectionnel suppose de s’intéresser non pas seulement aux inégalités vécues par les femmes en comparaison des hommes, mais aussi et de façon simultanée aux autres caractéristiques des individus, et qui conditionnent les inégalités dont elles et ils souffrent. Pour en revenir sur les recherches empiriques, cela suppose de ne pas comparer le groupe des femmes au groupe des hommes, mais de comparer des groupes plus fins (par exemple en ajoutant à la caractéristique du genre celle de l’orientation sexuelle). Mener ces analyses est plus compliqué et suppose par exemple des échantillons plus importants, mais permet de moins homogénéiser des situations qui de fait ne sont pas homogènes. Cela permet par exemple de montrer, comme je l’ai fait dans un article co-écrit avec Léa Dorion, que les femmes lesbiennes ne subissent pas les mêmes violences au travail que les femmes hétérosexuelles (et pas non plus que les hommes gays) : elles sont par exemple plus victimes de comportements humiliants que les femmes hétérosexuelles et que les hommes gays.
Finalement, l’approche intersectionnelle semble aujourd’hui clé pour progresser dans nos connaissances sur les inégalités professionnelles entre femmes et hommes.
Publié le mercredi 05 mars 2025 . 3 min. 32
Les dernières vidéos
Management et RH

Les dernières vidéos
de Clotilde Coron




LES + RÉCENTES



LES INCONTOURNABLES
