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Attention, le pouvoir s’use quand on ne s’en sert pas

Publié le vendredi 12 mai 2023 . 3 min. 23

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Si vous avez déjà croisé une personne de pouvoir, qu’il s’agisse d’une personnalité politique, d’un chef d’orchestre, du directeur d’une grande administration ou d’un dirigeant d’entreprise, vous avez peut-être remarqué que c’est l’attitude de son entourage qui explique en grande partie son influence. Tout le monde se comporte à son égard avec déférence, on fait silence lorsqu’elle va prendre la parole, on s’écarte de son chemin pour la laisser passer, et c’est ce qui fait sa véritable autorité. En effet, le pouvoir, c’est-à-dire la capacité à obtenir des autres un comportement qu’ils n’auraient pas adopté d’eux-mêmes, cela se passe dans la tête de ceux qui obéissent, et non dans la tête de ceux qui ordonnent : si votre entourage estime que vous avez du pouvoir, vous en avez effectivement. Si à l’inverse votre entourage, et même vos subordonnés hiérarchiques, pensent que votre pouvoir est limité, vous aurez peu d’autorité sur eux. Vous aurez beau donner des ordres, ils ne seront généralement pas suivis d’effets. Vous aurez beau transmettre des instructions, personne n’en tiendra véritablement compte. Non, la seule manière d’avoir du pouvoir, c’est que celles et ceux sur lesquels il est supposé s’exercer acceptent que vous en ayez.

Bien entendu, l’autorité formelle qui vous est conférée par une structure hiérarchique est un élément clé. Si vous avez la capacité de promouvoir, récompenser ou sanctionner vos subordonnés, si leur succès ou leur échec professionnel dépend de votre appréciation, si vous maîtrisez des ressources dont ils sont dépendants, vous aurez généralement du pouvoir sur eux. À condition cependant qu’ils en soient bien conscients. Par conséquent, pour conserver le pouvoir qui vous a été conféré par votre organisation, il est indispensable que, de temps en temps, vous rappeliez que vous en disposez. Si vous n’utilisez jamais votre pouvoir, on risque d’oublier que vous l’avez, et de fait vous risquez de le perdre. Le pouvoir s’use quand on ne s’en sert pas.

À cet égard, le pouvoir, en tant que phénomène psychologique et social, est une force radicalement différente de ce qui peut exister en physique. En physique, lorsque vous laissez tomber un objet, l’énergie potentielle gravitationnelle qu’il contient disparaît. De même, un combustible perd son énergie au fur et à mesure qu’il brûle. À l’inverse, avec le pouvoir, lorsque vous vous en servez, son énergie potentielle augmente. Chaque fois que vous démontrez par vos actes l’étendue de votre autorité, vous la confortez dans l’esprit de vos subordonnés.

Attention cependant, si vous abusez de votre pouvoir, vous risquez d’inciter votre entourage à questionner sa légitimité. Il s’agit donc d’utiliser votre pouvoir avec mesure, mais de l’utiliser tout de même. Une option intéressante consiste ainsi à mobiliser tous les attributs symboliques de votre pouvoir, qui sont autant de signaux de rappel pour votre entourage. C’est le rôle de l’estrade ou de la baguette pour les chefs d’orchestre, des vastes bureaux pour les dirigeants d’entreprise ou des escortes de motards pour les responsables politiques. Tous les dictateurs de l’histoire ont compris l’importance déterminante de l’apparat et du décorum. Même si c’est regrettable, on peut même estimer que plus vous vous comporterez avec autorité, avec ce que cela implique de posture, d’assurance et d’apparence, plus votre entourage estimera que votre autorité est légitime. Le pouvoir réel, c’est le pouvoir perçu.


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