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Que ce soit dans le discours des managers, dans les ouvrages de stratégie ou dans les rapports de consultants, l’innovation est systématiquement présentée comme un facteur clé de succès. Élaborer de nouveaux procédés permet d’accroître votre efficience, tandis que proposer de nouvelles offres peut relancer l’intérêt de vos clients et vous permettre de distancer vos concurrents. Que ce soit par la réduction des coûts ou par la création de valeur, qu’elle soit de procédés ou de produits, l’innovation est un moteur essentiel de la performance.

Protéger l’innovation des imitateurs

Or, ce discours repose sur une condition implicite : pour qu’elle profite réellement à l’innovateur, l’innovation doit être protégée des imitateurs. Si à force d’investissements et d’expérimentations vous développez un nouveau procédé ou un nouveau produit et que vos concurrents n’ont aucun mal à le copier, vous aurez en fait travaillé pour eux, sans créer le moindre avantage concurrentiel. La protection de l’innovation est donc capitale, et pour cela, deux approches sont possibles : le brevet et le secret.

Déposer un brevet, c’est expliqué la découverte aux concurrents

Déposer un brevet vous confère l’exclusivité de votre invention pour une durée de 20 ans. Cela vous coûtera environ 5000 euros pour une protection limitée à la France, et jusqu’à 50 000 euros pour une protection internationale. Vous disposerez alors d’un droit exclusif d’utilisation de votre invention, un titre de propriété que vous pourrez éventuellement céder à des tiers. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle certaines entreprises brevètent leur inventions, mais ne cherchent pas par la suite à poursuivre d’éventuels contrefacteurs : ce qui les intéresse avant tout c’est l’opportunité de revendre leurs technologies. Cependant, n’oubliez pas que le brevet est un document public : pour breveter une invention, vous devez précisément expliquer en quoi elle consiste. C’est d’ailleurs l’un des rôles essentiels du brevet que d’assurer cette diffusion de l’information, qui permet une meilleure stimulation de l’innovation. Déposer un brevet, c’est expliquer à vos concurrents ce que vous avez découvert.

Le secret pour les innovations de procédé

Or, certaines entreprises ne souhaitent pas révéler leurs inventions : elles préfèrent recourir au secret. Parmi les secrets les plus fameux, qui concernent bien entendu plutôt des innovations de procédé que des innovations de produit – la notion de « produit secret » étant commercialement peu pertinente – on compte notamment la machine à faire les Post-it, celle à fabriquer les rasoirs Bic, ou encore la plupart des procédés utilisés par Michelin. Bien entendu, le secret vous permet d’éviter que vos concurrents ne vous imitent, et pour une durée potentiellement supérieure à la durée de vie d’un brevet, mais c’est une approche risquée : si jamais votre secret est éventé, vous ne bénéficierez d’aucune protection juridique. C’est ce qui est arrivé par exemple à la formule du Coca-Cola, que la chromatographie a permis de révéler, et qui n’est donc plus secrète. Par conséquent, recourir au secret impose d’adopter des tactiques comparables à celles des réseaux clandestins : fractionnement de l’information, dissimulation, codage des données, et confiance dans la fidélité absolue des principaux collaborateurs.

Au total, si la protection de l’innovation est essentielle, le choix entre le brevet et le secret dépend avant tout du contexte, mais surtout de la culture de votre organisation. Certaines, comme Michelin, sont viscéralement attachées à la confidentialité, alors que d’autres, comme Tesla, vont jusqu’à annoncer que leurs brevets font partie du domaine public. Quoiqu’il en soit, n’oubliez pas l’affirmation malicieuse de Bill Gates : « La propriété intellectuelle a la durée de vie d’une banane. »


Publié le mardi 14 janvier 2020 . 3 min. 40

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