Peut-être avez-vous déjà vu ce dessin humoristique : dans une ferme, deux cochons discutent. « Elle est super confortable cette ferme » dit le premier cochon. « Oui, et même la nourriture est gratuite ! » ajoute le second. En fait, ce dessin est une excellente métaphore du modèle économique du gratuit, celui qu’utilisent Google, Facebook, Twitter, Snap, Instagram ou encore WhatsApp.
Vous vous êtes peut-être déjà demandé pourquoi vous pouvez utiliser tout à fait gratuitement des services aussi élaborés que ceux que propose Google. Après tout, avant Google, chercher sur Internet ou posséder une adresse mail impliquait de recourir à des portails d’accès comme AOL ou Wanadoo, qui fonctionnaient tous par abonnement : il fallait payer pour s’en servir. Google a décidé de renverser cette logique économique : celui qui paye n’est plus l’utilisateur qui cherche, mais l’annonceur qui veut être trouvé. De fait, le client de Google, de Facebook, de Twitter, de Snap, d’Instagram ou de WhatsApp, ce n’est pas l’utilisateur, ce n’est pas vous, c’est l’annonceur qui paye pour que vous le remarquiez. Ce que vendent les géants du web à leurs clients, ce ne sont pas leurs services, ce sont les données qu’ils ont collectées sur vous. Cependant, plus leurs services sont séduisants, plus vous êtes tenté de les utiliser, et plus vous les utilisez, plus vos données prennent de la valeur. Ils savent ce que vous faites, où vous êtes, ce que vous cherchez, avec qui vous discutez et à propos de quoi.
De fait, vous pouvez résumer le modèle économique du gratuit par la formule lapidaire suivante : « Quand c’est gratuit, c’est vous le produit ». Ce que vendent Google, Facebook, Twitter, Snap, Instagram ou WhatsApp, c’est vous. L’analogie avec les deux cochons est donc tout à fait justifiée : tout comme ils n’ont rien à payer pour la ferme et la nourriture, vous n’avez rien à payer pour Google, car en fait, dans l’équation économique, c’est vous le produit. Vous êtes un cochon dans la ferme.
Ce modèle n’a en soi rien de nouveau, car c’est depuis toujours celui des chaînes de télévision ou des stations de radio privées, tout comme il n’a rien de répréhensible, à condition bien entendu que vous soyez bien conscient du fait que c’est votre statut de produit et la marchandisation de vos données personnelles qui vous permettent d’utiliser gratuitement des services aussi élaborés que Twitter, YouTube ou Facebook Messenger. On peut au passage saluer le raffinement extrême du modèle de Facebook, qui monétise votre réseau relationnel et vos « likes ». En fait, Facebook gagne des milliards en monétisant vos sentiments.
Au total, la prochaine fois que vous accéderez à un de ces services, ayez une pensée émue pour les cochons dans la ferme : contrairement à vous, espérons-le, ils n’ont pas conscience d’être des produits.
Publié le jeudi 06 avril 2017 . 2 min. 55
Les dernières vidéos
Stratégie
Les dernières vidéos
de Frédéric Fréry
LES + RÉCENTES
LES INCONTOURNABLES