Connexion
Accédez à votre espace personnel
Recevez nos dernières vidéos et actualités quotidiennementInscrivez-vous à notre newsletter
ÉCONOMIE
Décryptages éco Intelligence économique Intelligence sectorielle Libre-propos Parole d'auteur Graphiques Notes de lecture
STRATÉGIE & MANAGEMENT
Comprendre Stratégies & Management A propos du management Parole d'auteur
IQSOG
RUBRIQUES
Économie généraleFranceEurope, zone euroÉconomie mondiale Politique économique Emplois, travail, salairesConsommation, ménagesMatières premières Finance Géostratégie, géopolitique ComprendreManagement et RHStratégieMutation digitaleMarketingEntreprisesFinanceJuridiqueRecherche en gestionEnseignement, formation
NEWSLETTERS
QUI SOMMES-NOUS ?


La vie intérieure et l'intime au péril du numérique

Publié le lundi 18 mars 2019 . 3 min. 57

Voir plus tard
Partager
Imprimer

Qu’est-ce que la vie intérieure ? A Bernard Pivot qui l’interrogeait sur cette question dans Apostrophes il y a trente ans, la réponse d’Umberto Eco le grand intellectuel italien fut la suivante : « la vie intérieure ?  La vie intérieure, c’est là où il n’y a pas de téléphone. »


Hélas nous sommes en droit aujourd’hui de nous poser cette douloureuse question : existe-t-il encore un seul endroit sans que le téléphone puisse sonner ? Est-il encore possible de trouver un lieu, un ancrage, où chacun puisse se retrouver seul sans l’interférence du regard et du jugement d’autrui, sans que je sois vu, su ou entendu par quelque personne d’autre que moi-même ?


Claudine Haroche, une anthropologue directrice de recherche au CNRS qui a participé à l’ouvrage collectif Le devenir de l’intériorité à l’heure des nouvelles technologies, semble en douter. La vie intime est mise à mal par toute une série de circonstances intrusives dont les portables ne sont pas les moindres. Tout relève de l’immédiat et de l’instantané de telle manière que le rapport de soi à soi est devenu quasiment impossible. Se concentrer même quelques instants sur la résolution d’un problème paraissant même relever de l’exploit. En résulte un moi toujours disponible mais parcellisé, effiloché bref, divisé.


Or comme nous font remarquer les auteurs de ce livre aux approches multipes, sans un possible moment d'imperceptibilité et d’invisibilité, c’est toute la construction d’un espace intérieur qui est mis en défaut. Et par conséquence c’est la liberté de chacun, la possibilité même d’avoir une intime conviction, qui s’en trouve mis à mal. L’extimité selon l’expression de Serge Tisseron a besoin au préalable de l’intimité comme le clair succède à l’obscur, l’espace public à l’espace privé. Une société qui n’aurait plus besoin de quelque cadenas serait comme le Panoptique de Bentham, une prison infinie.


Paradoxalement toutefois, en plus de ce besoin d’isolement, nous avons aussi un autre besoin simultané, tout aussi vital, d’être vu. Pour Rousseau, ou plus près de nous pour Gaston Bachelard, sans l’altérité c’est notre humanité même qui est mise à défaut. Le moi n’est rien s’il n’est reconnu comme tel par autrui, et ce de manière ostensible : le personnage littéraire de Robinson, tentant de combler le vide qui l’entoure, nous en donne une parfaite illustration. Ce désir de reconnaissance passe donc pour être constitutif de ce que nous sommes au plus profond de nous-mêmes.


Dès lors, le devenir de l’intériorité est suspendu à la question de savoir ce que nous donnons à voir de nous-mêmes, et ce que nous préférons préserver intimement. Pour le philosophe Eric Fiat, co-coordinateur de l’ouvrage, cette situation est constitutive du « clair-obsur » qui nous est propre. C’est là une question finalement on ne peut plus morale : voulons-nous le décent ou l’indécent ? C’est parfois difficile à dire car comme l’indique Eric Fiat la pudeur dépend du milieu dans lequel on se trouve : « dans les familles bourgeoises » indique-t-il, «  il fallait se tenir, maintenant il faut « se lâcher ». De sorte que la vertu de pudeur n’est accessible qu’à celles et ceux qui font preuve de jugement, de juste mesure, de « rapport exact », de « mesotês » comme disait Aristote.


De toutes ces analyses, que peut en retenir un manager ? Dans une chronique antérieure j’avais avancé l’idée que le management, qui venant de « manus » la main en latin, était d’abord une sorte d’habileté, une délicatesse, une forme de tact. Or c’est précisément de cela dont il est question ici avec la pudeur, qui n’est qu’une manière de se comporter à l’égard d’autrui avec tact justement. Page 69, Eric Fiat trouve les mots justes pour décrire une des facettes importante du savoir-vivre en entreprise: «  ce que l’autre ne m’a pas caché » écrit-il, « je me le cache en ne le regardant pas. Je détourne mon regard de ce que j’ai eu gêne d’apercevoir. »


D'APRÈS LE LIVRE :

Le devenir de l'intériorité... à l'ère des nouvelles technologies

Le devenir de l'intériorité... à l'ère des nouvelles technologies

Auteur : Collectif sous la direction d'Eric Fiat et Jean-Christophe Valmalette
Date de parution : 16/03/2018
Éditeur : Editions Le Bord de l'eau
COMMANDER

Les dernières vidéos
Mutation digitale

Les dernières vidéos
de Ghislain Deslandes

x
Cette émission a été ajoutée à votre vidéothèque.
ACCÉDER À MA VIDÉOTHÈQUE
x

CONNEXION

Pour poursuivre votre navigation, nous vous invitons à vous connecter à votre compte Xerfi Canal :
Déjà utilisateur
Adresse e-mail :
Mot de passe :
Rester connecté Mot de passe oublié?
Le couple adresse-mail / mot de passe n'est pas valide  
  CRÉER UN COMPTE
x
Saisissez votre adresse-mail, nous vous enverrons un lien pour définir un nouveau mot de passe.
Adresse e-mail :