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Notre tendance à la formalisation et à l’abstraction a pour objectif de satisfaire notre quête d’efficacité mais aussi de nourrir notre besoin de certitudes.


Les travaux des gestionnaires sur la compétence, laquelle peut être définie comme la capacité à satisfaire une tâche, n’échappent pas à ce double enjeu et aux risques associés. Cependant, les faits sont têtus, pour être compétent, la compétence ne suffit pas, pour au moins trois raisons :


1. La compétence, qu’elle soit dite dure ou douce, si toutefois une telle segmentation puisse être possible dans la réalité, ne s’exprime que dans l’action et dans un contexte donné. Bien souvent, le contexte n’est pas totalement modélisable à priori à cause de l’indétermination de la vie.

2. La compétence, si elle peut être passablement modélisable ex ante, c’est parce qu’elle s’exprime dans un réel qui se répète avec des règles bien définies et un objectif à atteindre bien précis : c’est ce que Winnicott appelle le « game ».  Le réel, ce n’est pas seulement ce qui se répète (le game), c’est aussi, surtout « le play » c’est-à-dire ce qui ne se répète pas, ce qui est par essence infiniment variable, instable et nécessitant une implication subjective forte. Ce « réel » n’est pas, par définition, maitrisable ex ante.

3. Postuler que la compétence suffit pour agir efficacement, c’est postuler implicitement que les mots, les mots d’ordre contiennent le sens. En effet, les Hommes, au travail comme dans les autres sphères de la vie, ne se meuvent à bon escient que par le truchement du sens qu’ils donnent aux choses. Le sens n’est jamais dans les mots mais à côté des mots car il est construit par le biais de processus complexes. Il ne peut donc y avoir de relation de causalité entre de supposées compétences et l’atteinte des objectifs en termes d’efficacité mais dans le meilleur des cas un lien de corrélation car l’interprétant c’est-à-dire le travailleur est un acteur non une simple ressource.


Une pédagogie basée exclusivement sur les compétences n’est pas suffisante pour une action efficace dans le temps et dans l’espace.


Elle peut même nuire à l’action car souvent, faire face au réel, suppose de pouvoir dépasser, critiquer la tâche.


Dépasser, critiquer la tâche ne sont pas prescriptibles. De telles actions nécessitent d’avoir un jugement « correct » lequel est nourri par la culture générale c’est à dire tout savoir, toute connaissance qui permet de s’orienter dans la pensée et dans l’action par le truchement de l’imagination et de la sensibilité.


Publié le jeudi 16 mars 2023 . 2 min. 53

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