Adieu les seniors, bonjour les « perennials » ?
Aurions-nous un problème avec nos vieux ?
Certainement !
Quand je parle de vieux ici, je fais allusion au plus de 50 ans, et en toute rigueur plus de 45 ans car c’est à cet âge-là qu’on devient seniors sur le marché du travail.
Et il faut le dire, du même coup : suspect ! Suspect d’inemployabilité, suspect de sous-performance, suspect de manque de motivation …
Les chiffres sont là : en 2017, le taux d’emploi des 55-64 ans en France est de 51,3%. S’il est de 71,9% pour les 55-59 ans il plonge à 29,4% pour les 60-64 ans.
Les seniors sont surreprésentés parmi les chômeurs de longue et de très longue durée. Ainsi, en 2018, les chômeurs de plus de 50 ans restaient en moyenne 673 jours au chômage, contre 388 pour l’ensemble des demandeurs d’emploi.
Mais, être seniors, c’est aussi moins de formations, moins de promotion dans l’emploi.
Depuis des années, on recense de très nombreuses propositions toutes très concrètes pour rendre les seniors plus désirables. Ces propositions sont certes nécessaires mais visiblement pas suffisantes.
Il faut entamer un nouveau récit ! Pour prendre la place de celui qui a été écrit à compter des années 70 d’un senior obsolescent, désireux de la retraite, et qui laisserait son emploi à un jeune, plus motivé, plus énergique, plus performant ?
Car la fable a pris, et contre toute attente, a été parfaitement assimilée par les impétrants eux-mêmes.
Les quinquas sont les premiers à partir quand il est proposé un plan de départ, ils sont dans la plus complète auto-censure dans les entretiens de recrutement où ils s’efforcent de paraitre jeunes, comme si la vieillesse était une infamie. Ils développent ce qu’Eléonore Marbot appelait dans sa thèse de doctorat : le « sentiment de fin de vie professionnelle », se mettant les premiers en pédale douce quelques années avant le moment de partir à la retraite.
Certes, beaucoup de seniors ont été usés par leur vie professionnelle, psychiquement et physiquement et aspirent à une vie plus douce et plus libre. Mais beaucoup aimeraient rejoindre un emploi, pas seulement pour des raisons financières, mais aussi pour la reconnaissance sociale que donne le travail.
Beaucoup d’ailleurs sont investis dans le tissu associatif et font tourner la société avec ce travail gratuit.
Certes, réjouissons-nous de ne pas voir des personnes de plus de 80 ans remplir des sacs de courses aux caisses des supermarchés comme on le voit aux USA ! Mais pour ceux qui le souhaitent, faisons bloc contre le jeunisme à tout crin !
Une piste intéressante : l’avènement des Perennials !
Ce terme est apparu en 2016 aux Etats-Unis, en miroir de la génération des "Millenials". Il désigne les plantes "pérennes", vivaces, qui refleurissent d'une saison sur l'autre.
Selon le cabinet KPMG, "Les 'Perennials' sont des personnes dont la vitalité n’est pas affectée par les années qui passent. Ils reprennent des études à la quarantaine et créent des entreprises à la soixantaine. Ils peuvent changer de régime alimentaire tels des adolescents et se lancent dans des road-trips à l’âge où d’autres découvrent le plaisir des croisières (…) Les 'Perennials' se comportent à 50, 60 ou même 70 ans de la même façon qu’ils le faisaient à 30. Vieillissant dans leur corps -ce qu’ils acceptent- mais pérennes dans l’esprit."
Assumer son âge tout en maintenant une activité épanouissante !
Nous entrons dans « une ère où on vit 100 ans » comme l’ont décrété le Japon ou Taiwan, qui sont des sociétés de plus en plus vieillissantes.
Les mesures comptent évidemment, mais un nouveau récit doit se mettre en route, pour parer à ce qui est la première discrimination sur le marché du travail : l’âge !
Publié le mardi 22 mars 2022 . 4 min. 13
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d'Isabelle Barth
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