Netflix et les managers

2014, l’arrivée de Netflix en France. Et avec elle des dizaines de séries se déroulant dans le monde du travail : cabinet d’avocat, supermarché, services de police, agence de publicité…  Une sphère professionnelle très présente mettant en scène des figures fortes, des leaders, des managers très stimulants mais déployant des façons de faire souvent très peu compatibles avec des normes RSE.

Car en effet, si certains chefs sont plutôt bienveillants dans les séries, on peut penser à l’extraordinaire Ted lasso dans son club de football ou à la brillante avocate Diane Lockart … la plupart des figures de managers sont inconciliables avec les bonnes pratiques entrepreneuriales … et pourtant ils fascinent, ils inspirent, et bien sûr, ils performent. 

Souvent autoritaires, toujours directifs, parfois cruels ils incarnent le véritable top-down que nous rejetons tous…
En vrac : Dr House, Olivia Pope, Franck Underwood, Shabby, Anne-Lise Keating, Emmanuel Teyssier, Harvey Specter, Dan Harper …

Ces quelques séries que sont Scandal, Ici tout commence, Murder, Mad Men, aiment à nous à faire détester ces personnages hors cadre. Autant d’individus qui, dans n’importe quelle entreprise seraient manu militari mis à l’index, aux RH et à la porte !

Sur la première marche du podium de l’horreur le – néanmoins -  très célèbre Dr House… dont je ne suis pas sûre qu’on accepte aujourd’hui le sexisme, l’antisémite, le racisme et le valdisme – et ce malgré son propre handicap !

Ces personnages représentent parfaitement l’ideal-type du leader charismatique à la Max Weber : 
Ils stimulent, envoutent, et s’imposent… ils sont des demis dieux, des trois quart de déesses, en d’autres termes des héros. Ils sont de ceux qui ont une route devant eux, une sorte de vision, ils tracent et donnent l’impression de ne jamais flancher. Loin de la bureaucratie aseptisée, ils sont presque des Avengers…!

Et au final, tout leur pardonné, car ils performent. Dan Harper est un génie de la publicité, Olivia Pope terrasse n’importe quel scandale politique, et Harvey Specter gagne toutes ses affaires…

Est-ce qu’être génial donne droit à tout ? Est-ce que le manager inspirant et captivant est forcément tyrannique ? Est-ce que la verticalité, l’autorité, voire l’autocratie participe du charisme ? Doit-on pardonner à ces personnages outrances et égarement… sous prétexte de performance ?

Mais, ne nous y trompons pas, ils sont des super leaders dotés de supers pouvoirs dont on adore la part d’ombre, dont on vénère les failles :  les douleurs chroniques de House, la sclérose en plaque d’Emmanuel, l’alcoolisme d’Olivia, l’enfance de Dan…

C’est leur complexité, c’est leur humanité, leurs démons intérieurs qui in fine interpellent…

L’empathie se substitue alors à la fascination, on est seule face au miroir comme Anne Lease Keating dans Murder et on prend toute son épaisseur…  

Une question pour finir : le grand leader serait-il toujours un tyran blessé ?