D’où vient l’écart considérable de valorisation entre les marchés d’actions américain et européen ? Il est difficile à mettre en rapport avec les fondamentaux de croissance ou de profitabilité. Pour en prendre la mesure, partons des évolutions des Bourses depuis leurs précédents sommets d’avant crise.
Côté US, le S&P 500 surplombe aujourd’hui ses précédents pics de près de 60%. Et les actions, malgré le gros aléa incarné par Trump, continuent à avoir le vent en poupe. Côté européen, l’euro stoxx n’a toujours pas retrouvé ses précédents sommets. Il est en retrait de 13 % par rapport à ses précédents records. Il y a certes des disparités intra-européennes : le CAC 40 colle à l’évolution moyenne de l’indice européen, tandis que le champion allemand surperforme en Europe. Mais même côté allemand, la performance fait pâle figure comparée à ce qui se passe de l’autre côté de l’Atlantique. Le Dax n’a dépassé que de 9% ses anciens sommets. Et si l’on se focalise sur l’autre indice phare américain, le Nasdaq, l’Europe parait bel et bien décrochée.
La sur-représentation des valeurs technos dans l'indice américain fausse la comparaison
Faut-il y voir une bulle côté américain, un emballement infondé qui nous rapproche d’un nouvel accident financier ? Pas nécessairement. Car derrière l’emballement américain, il y a d’abord un effet de composition manifeste. Il suffit de regarder les dix premières capitalisations américaines pour comprendre que l’eurostoxx ou le S&P500 ne recouvrent pas la même économie, ni les mêmes structures productives. Dans les dix premières capitalisations il y a d’abord les GAFA : Apple Facebook, Amazon et Google (à travers sa holding Alphabet), qui à eux quatre représentent près de 20% de l’indice, avec un pouvoir de marché et de réseau considérable, des rendements croissants et des perspectives de croissance exceptionnelles. Apple à lui seul représente 3,6% de la capitalisation.
La performance moyenne du S&P 500 recouvre en fait des progressions d’indices très hétérogènes selon les secteurs. Au sommet de la performance, toujours depuis les pics d’avant crise, on trouve le e-commerce, les valeurs technologiques et la santé, boostée par les biotechnologies. Ces trois secteurs locomotives du S&P500 ont vu leurs cours plus que doubler depuis leurs précédents records. L’industrie évolue dans la moyenne du S&P500, tandis que la finances et l’énergie plombent l’indice, en retrait encore de plus de 10 % de leurs anciens records.
La comparaison par secteur réduit les écarts
Il faut tenir compte de cette hétérogénéité pour apprécier le retard européen. Si l’on prend quelques secteurs emblématiques, on voit que les écarts par secteur ne sont plus aussi manifestes que ne le suggère la moyenne. Les valeurs industrielles ont certes moins progressé de ce côté-là de l’Atlantique, mais elles surpassent nettement leurs anciens pics et leur moindre rebond peut s’expliquer par le contexte macro-économique peu porteur côté européen.
Les valeurs financières ont évolué de la même manière en Europe et aux Etats-Unis. L’énergie plombe l’indice en Europe comme aux Etats-Unis, et son décrochage plus marqué peut s’expliquer par les écarts de législation, notamment l’absence d’effet gaz de schiste.
Quant aux secteurs d’avenir, des technologies de l’information ou de la santé, le fait de les voir nettement moins briller dans la vieille Europe n’est pas un scoop. Nous n’avons ni les géants planétaires, ni les plateformes qui nous permettent aujourd’hui de capter ces marchés en forte croissance.
Ajoutons à cela la politique active de rachat d’actions des groupes américains, et l’écart de valorisation de part et d’autre de l’Atlantique n’est sûrement pas l’anomalie que suggère en première analyse l’évolution des indices.
Olivier Passet, Bourses : pourquoi l'Europe ne peut pas rattraper les Etats-Unis, une vidéo Xerfi Canal Economie.
Publié le jeudi 12 octobre 2017 . 4 min. 15
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