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Les sciences économiques au défi de la violence sociale

Publié le mardi 23 juillet 2019 . 4 min. 46

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Deux conceptions s’affrontent habituellement en matière économique.


La première consiste à regarder l’économie comme une science capable, en tant que telle, d’aboutir à des conclusions relevant de l’ordre de la vérité. La deuxième considère, à l’inverse, que l’économie s’insère d’abord dans une vision politique, et qu’elle a pour objet d’apporter une rigueur de raisonnement à l’analyse et aux politiques qui découlent de cette vision. Comme on le sait, le débat entre les deux camps est vif, mais, malgré leurs antagonismes, ils ont en commun de fonder leur approche sur une rationalité, baptisée « science » par les premiers et « rigueur d’analyse » par les seconds.


Mais la réalité est plus complexe car, à y regarder de près, on s’aperçoit que l’élaboration, et surtout la mise en œuvre des politiques économiques, ne relèvent que partiellement de la rationalité.


Prenons comme exemple celui de l’annonce faite le 25 avril d’une baisse significative de l’impôt sur le revenu en France. La réaction négative à cette mesure de la part de nombreuses personnes devant en bénéficier illustre bien ce point : selon elles, le problème ne serait pas d’abaisser l’impôt sur le revenu des classes moyennes mais de rétablir l’impôt sur la fortune.


Une clef de compréhension de ce phénomène réside dans la théorie du désir mimétique décrite par l’anthropologue français René Girard à travers son œuvre. Pour résumer celle-ci à l’extrême, René Girard fait le constat de l’omniprésence d’une violence sociale ancrée dans le désir mimétique, et conclut à la nécessité d’exorciser cette violence par le sacrifice de boucs émissaires. On peut comprendre la défiance instinctive des économistes par rapport à cette approche tant elle est éloignée de leur façon naturelle de procéder. Et pourtant, René Girard nous décrit de façon magistrale un désir mimétique, certes non-rationnel au sens cartésien du terme, mais qui constitue, toujours et partout, un moteur essentiel des sociétés humaines.


Traduite dans la sphère économique, la violence mimétique théorisée par René Girard signifie que l’homo oeconomicus de nos livres d’économie, qui est comme on le sait un monstre de rationalité et de maximisation froide de son intérêt matériel, ne décrit pas, ou dans le meilleur des cas très partiellement, la réalité du comportement humain. Et si l’on prend l’optimum de Pareto, cher aux économistes et dont le caractère optimal vient de l’impossibilité d’améliorer la situation d’un acteur sans dégrader celle d’un autre, on voit à quel point il est d’une utilité faible pour décrire la réalité du monde si l’on adopte la clef de lecture procurée par René Girard.


Reprenons l’exemple de la préférence exprimée par certains du rétablissement de l’impôt sur la fortune plutôt qu’un abaissement de l’impôt sur le revenu : leur préférence va donc à l’abaissement de l’autre, le riche, via la taxation de son capital, plutôt qu’à l’élévation de leur propre condition matérielle via l’abaissement de l’impôt sur le revenu. La dimension mimétique de la situation est évidente. Et, au bout de cette logique, il y a la demande de sacrifice d’un bouc émissaire, le riche, symbolisé par sa fortune. Le cadre conceptuel fourni par René Girard fonctionne à merveille.


Bien sûr, le débat sur la taxation du capital s’inscrit dans le contexte économique d’inégalités croissantes dont les conséquences négatives font l’objet d’analyses aussi rationnelles que pertinentes de la part de nombreux économistes. Ces analyses sont importantes, mais la question est plus profonde que celle à laquelle peut aboutir une analyse économique. En effet, pour citer René Girard, « quand la crise mimétique est très intense elle provoque une violence telle qu’elle n’a plus d’objet, elle va empêcher tout accord entre les hommes et elle va toujours s’agrandir ».


Les économistes et les décideurs politiques doivent prendre en compte la violence sociale mimétique qui s’étale sous nos yeux. La non-rationalité de certaines situations ou de certaines positions ne devrait pas constituer un prétexte pour les écarter d’un revers de la main car ce phénomène est universel.


Les économistes doivent le comprendre, même s’ils auront du mal à le théoriser, et les responsables politiques doivent l’intégrer dans leur raisonnement en tant que réalité sociale fondamentale.


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