Dans un monde saturé d’informations, où la complexité et les incertitudes prospèrent de façon exponentielle, toute tentative de maitrise totale des phénomènes économiques et sociaux est vouée à l’échec. La masse de données et d’informations disponibles est devenue telle que leur traitement dépasse très largement les capacités d’un cerveau humain aussi brillant soit-il.
Dans ce contexte, il est une compétence déterminante à mesure que l’on se rapproche des décisions stratégiques au sein d’une organisation. Cette compétence, c’est l’esprit de synthèse, une forme d’intelligence critique dont on sous-estime trop souvent la teneur et la portée.
En matière de leadership, l’esprit de synthèse se distingue nettement d’un résumé ou d’un condensé de texte car l’objectif n’est pas de compresser ou simplement d’extraire fidèlement toutes les composantes saillantes d’un sujet ou d’une situation.
Ici, l’esprit de synthèse est avant tout un parti pris concis et débarrassé du souci d’exhaustivité. En acceptant sciemment les angles morts, l’esprit de synthèse se concentre exclusivement sur ce qui est jugé essentiel, critique et de nature à stimuler l’entendement.
Dans les entreprises, certains dirigeants sont connus pour leur remarquable esprit de synthèse à l’instar de François Dalle, l’ex-patron de L’Oréal. Voici par exemple ce qu’il dit un jour en privé à propos de Jean-Marie Messier qui, à l’époque, multipliait les acquisitions pour faire du groupe Vivendi Universal un conglomérat mondial des médias et des communications :
« Il va se casser la gueule et ce, pour une raison assez simple. Son métier c’est de vendre et il ne fait que racheter ».
La synthèse est lapidaire mais elle identifie de façon aussi cruelle que prémonitoire le talon d’Achille d’une stratégie qui s’est avérée délétère.
Dans cet exemple on voit bien que l’esprit de synthèse n’est pas un simple exercice de style et n’a pas grand-chose à voir avec les analyses sophistiquées et les argumentaires diplomatiques. Ce n’est pas non plus un mode traitement de l’information.
Affranchi de la tyrannie du détail et méfiant à l’égard de tout excès de subtilité ou de complexité, l’esprit de synthèse apparait comme un jugement créatif, concis, et incisif au service de l’action. Il impact les consciences, inspire les parties prenantes et prépare la décision.
Ainsi définit, l’esprit de synthèse doit-il craindre la fulgurante progression des intelligences artificielles ? Selon ChatGPT, la principale vertu des machines apprenantes est leur « capacité à améliorer l'efficacité et la précision des tâches, tout en réduisant le temps et les coûts associés à leur réalisation ».
Cette compétence, aussi remarquable soit-elle, ne rivalise pas avec l’esprit de synthèse qui demeure une forme d’intelligence supérieure à l’érudition créatrice de la machine.
Publié le mercredi 30 août 2023 . 3 min. 21
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