Jamais la question du « travailler ensemble » n’a suscité autant d’intérêt dans les entreprises et ce à tous les niveaux. Mais si le travail collectif est aujourd’hui auréolé de toutes les vertus, son chemin est plus que jamais pavé de zones d’ombre et l’utilisation approximative de certains termes n’arrange pas les choses.
Prenons l’exemple de la « collaboration » et de la « coopération ». Ces deux termes sont très souvent utilisés de façon interchangeable et les définitions proposées sont généralement simplistes.
Il faut dire que même les experts en management, en sociologie des organisations ou en psychodynamique du travail ne s’entendent pas sur la distinction qu’il serait utile de faire entre « collaboration » et « coopération ».
Etymologiquement, la différence est pourtant palpable puisque collaboration signifie « travailler ensemble pour faire » alors que coopération désigne le fait « d’œuvrer ensemble pour savoir ».
A partir de là, on peut dire que la collaboration se manifeste par la recherche d’un consensus au sein du collectif pour mieux servir un idéal de production. En partageant les mêmes valeurs et les mêmes objectifs et grâce à la complémentarité et la coordination des efforts du groupe, il sera possible de produire plus et mieux.
La collaboration est donc parfaitement compatible avec les dispositifs de déhiérarchisation et d’amélioration des conditions de travail ou de télétravail. Ce qui compte c’est le respect mutuel de chacun et la défense des intérêts vitaux de l’entreprise. Le « lean management » répond parfaitement aux caractéristiques de la collaboration.
La coopération s’inscrit dans un registre différent, celui de l’entraide créatrice au service d’un idéal de prospérité. La coopération a donc besoin d’un écosystème ad hoc qui va s’opposer à l’organisation en silo et favoriser la confrontation des divergences d’intérêts entre les parties prenantes. A cela s’ajoute une volonté réelle et sérieuse d’apporter une contribution éminemment responsable aux défis sociaux et environnementaux du monde moderne.
La coopération apparait ainsi comme une forme singulièrement estimable du travailler ensemble. Mais force est de constater qu’elle est assez rare en pratique notamment parce que la collaboration dévore la coopération pour reprendre l’expression d’Eloi Laurent. Autrement dit, le rythme fou dans lequel s’est engouffré l’humanité exalte l’esprit de compétition au détriment de l’esprit de contribution au service d’intérêts supérieurs à ceux du mercantilisme.
Mais c’est aussi parce que la pratique de la coopération est problématique. Avant tout, parce que notre système éducatif récompense prioritairement l’individualisme. Combien de notes collectives un français à obtenu lorsqu’il arrive au baccalauréat ?
Ensuite, parce que la coopération créée de la dépendance et génère du conflit. En ne cherchant pas le consensus, la coopération exige de confronter les points de vue pour arriver à un compromis. De plus, l’entraide au travail oblige les acteurs à être transparents sur leurs points faibles et il faut bien avouer que n’est pas toujours facile à assumer. Enfin, l’équité de la rémunération des membres d’un groupe de travail n’est pas évidente à trouver.
Le général de Gaulle a dit un jour : « L’aventure personnelle est une passion enfantine ». C’est vrai, mais l’aventure collective à plus à offrir au monde qu’une simple superposition de compétences.
Publié le vendredi 17 juillet 2020 . 3 min. 52
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