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En 2012, David Jones, le PDG de Havas, décide de racheter Victors & Spoils. Fondée en 2009, Victors & Spoils est une agence de « crowdsourcing » publicitaire. Plutôt que de faire appel à des créatifs, elle utilise la « foule » pour générer des idées. Son business model est donc très différent de celui des agences de publicité traditionnelles. D’après John Winsor, le PDG de Victors & Spoils, cette approche novatrice permet de diminuer le coût des campagnes publicitaires de 30% à 90% … tout en conservant un très haut niveau de créativité.


Malheureusement, la greffe ne prendra jamais. Bien qu’il ait été nommé Chief Innovation Officer de Havas, John Winsor fait face à l’opposition farouche des créatifs. Les responsables des filiales rechignent aussi à intégrer le « crowdsourcing » publicitaire à leur offre. Fin 2013, David Jones quitte l’entreprise. Comment expliquer cet échec ?


Contrairement à un grand nombre de dirigeants, David Jones avait une vraie stratégie digitale pour Havas. Mais il ne s’est pas suffisamment préoccupé de sa mise en œuvre. Plutôt que de la déléguer à John Winsor, il aurait dû :


•          mieux justifier la coexistence de l’activité d’origine et de l’activité digitale. Chez Havas, David Jones a fait le pari que le « crowdsourcing » était l’avenir de la création publicitaire. Malheureusement, il n’a pas réussi à persuader son top management que le business model traditionnel et le « crowdsourcing » étaient des activités complémentaires. Pour les créatifs (et même pour les responsables des filiales), le « crowdsourcing » représentait moins une opportunité de développement qu’une menace ;


•          obtenir l’appui du top management. Si une nouvelle activité n’est pas « poussée » par le top management, elle sera laminée par l’activité d’origine. Chez Havas, les responsables des filiales jouissaient d’une très forte autonomie. Plutôt que d’investir dans le « crowdsourcing », ils ont préféré continuer à travailler comme ils l’avaient toujours fait. On peut les comprendre. A court terme, il est plus rentable de favoriser l’activité d’origine par rapport à la nouvelle activité ;


•          séparer l’activité digitale de l’activité d’origine (mais pas trop …) La principale erreur commise par David Jones est peut-être de n’avoir pas suffisamment séparé l’offre de « crowdsourcing » de l’offre historique. Mais la nouvelle activité ne doit pas non plus être trop isolée. Elle doit pouvoir bénéficier de synergies avec l’activité d’origine.


En bref, il ne suffit pas d’avoir une stratégie digitale pour réussir sa transformation digitale. Il faut aussi parvenir à la « vendre » à toute l’entreprise … et ce n’est pas chose facile.


 
Source: O’Reilly, C., Tushman, M. (2016), Lead and disrupt: How to solve the innovator's dilemma, Stanford University Press.


Publié le mercredi 24 mai 2017 . 3 min. 08

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