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L'argent et le bonheur : un débat de prix Nobel

Publié le jeudi 4 janvier 2024 . 4 min. 43

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Même si vous n’êtes pas un fan de littérature économique, vous avez sans doute entendu parler d’une étude de 2010, signée de Daniel Kahneman et Angus Deaton (tous deux Prix Nobel d’économie). En analysant 450.000 réponses à des questionnaires sur le bien-être, les deux auteurs s’étaient demandé s’il existait un lien entre le revenu disponible et le bien-être ressenti. Leur conclusion : oui… mais seulement jusqu’à 75.000 dollars de revenu annuel en monnaie de l’époque. Au-delà de ce seuil, expliquaient-ils, la courbe s’aplatit : plus de revenus n’ajoute pas au bonheur. Bref, comme le titrait à l’époque un journal rendant compte de cette étude, « hauts revenus ne riment pas avec bonheur ».

On peut, bien sûr, trouver des explications à ce phénomène. Une fois atteint un certain niveau de confort matériel, l’accumulation de biens ne nous apporterait guère de réelles satisfactions. Peut-être aussi qu’on s’accoutume à ce niveau de confort, à tel point qu’on n’est plus sensible au fait qu’il s’accroisse un peu. En tous, cas la conclusion que l’argent ne fait pas le bonheur semblait convenir à peu près à tout le monde.

Mais voilà qu’en 2020, un jeune chercheur, Matthew Killingsworth, reproduit cette étude sur un échantillon bien plus vaste et avec une méthode légèrement différente. Sa conclusion contredit les deux Nobel : pour lui, le bien-être ressenti continue d’augmenter avec le revenu, bien au-delà de 75.000, 100.000 ou même 200.000 dollars.

Comment est-ce possible ? Chose inhabituelle dans la recherche, Kahneman ne se contente pas de hausser les épaules et de passer à autre chose. Il collabore avec Killingsworth pour tenter de « résoudre le conflit ».

En 2023, leur conclusion est publiée. Il y avait bien une erreur dans l’étude initiale de Kahneman et Deaton, mais elle était subtile. Les chercheurs comptaient simplement le nombre de personnes dans chaque tranche de revenus qui déclaraient ressentir des émotions positives ou des émotions négatives. Le niveau de bien-être était représenté par le pourcentage des personnes ayant éprouvé ces émotions positives, ou n’ayant pas éprouvé d’émotions négatives. C’est cet indicateur de bien-être qui croît avec le revenu mais s’aplatit à partir de 75.000 dollars. 

Or cette mesure n’est pas très fine ; et surtout, elle ne place pas la barre très haut. Plutôt qu’une mesure de bonheur, c’est plutôt une mesure de l’absence de malheur. L’étude de Killingsworth, elle, profitant des progrès technologiques, demandait aux répondants de noter leur niveau de satisfaction plusieurs fois par jour sur leur smartphone. Elle pouvait donc plus facilement distinguer entre des gens heureux et des gens très heureux.

En d’autres termes, qu’aurait dû conclure l’étude initiale, c’est qu’au-delà de 75k, le malheur ne diminue plus. Mais cela ne veut pas dire que le bonheur ne s’accroît pas. En réanalysant les données, Kahneman et Killingsworth retrouvent bien l’effet d’aplatissement à 75.000 dollars… mais seulement chez les individus les plus malheureux ! Les gens heureux, eux, sont bien plus heureux avec 200.000 dollars qu’avec 100.000.

Comme souvent, une fois établie, cette conclusion semble intuitive. L’argent ne fait pas toujours le bonheur, mais si vous êtes déjà très heureux avec 75.000 dollars de revenu annuel, toutes choses égales par ailleurs, vous serez plus heureux encore avec le double. Inversement, l’argent ne résout pas tous les malheurs ; mais enfin, il en résout certains. Ainsi, si vous êtes malheureux alors que vous avez déjà un revenu confortable, c’est sans doute, hélas, pour des raisons qui n’ont pas grand-chose à voir avec votre revenu, et que plus d’argent ne fera pas disparaître.

Mais la conclusion principale des deux chercheurs ne porte pas sur le bonheur. Elle concerne la méthode par laquelle ils ont résolu leur désaccord. Plutôt que de défendre leur thèse chacun de leur côté, les deux chercheurs ont entrepris une « collaboration adversariale » : un travail commun pour résoudre le désaccord, arbitré par un tiers, ici la chercheuse Barbara Mellers. C’est une manière puissante de faire avancer la recherche de la vérité, qui n’est que rarement utilisée, sans doute parce qu’elle demande aux deux parties beaucoup d’humilité. Peut-être pourrions-nous nous en inspirer pour résoudre nos désaccords sur des questions moins complexes ?


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