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C’est devenu une évidence, presque une banalité : pour être meilleur, prendre de meilleures décisions, avoir de meilleures performances, il faut de la diversité. Mais est-on sûr que ce soit vrai ? Ou plus exactement, est-on sûr que ce soit suffisant ?

Commençons par l’essentiel : la diversité, qu’il s’agisse de genre, d’origine, de milieu social ou de toute autre catégorie, c’est d’abord une question d’équité. Si une catégorie de personnes est défavorisée dans l’accès à certaines fonctions, c’est une injustice, et corriger une injustice est une fin en soi. On ne devrait pas avoir besoin de se justifier de le faire.

Pourtant, on justifie souvent la recherche de diversité par un argument d’utilité. L’argument est souvent que la diversité des instances dirigeantes permet de prendre de meilleures décisions. D’ailleurs, il est devenu fréquent d’imputer de graves erreurs de management à l’absence de diversité. On se souvient par exemple du commentaire de Christine Lagarde expliquant que si Lehman Brothers avait été Lehman Sisters, elle n’aurait pas fait faillite. 

L’argument semble frappé au coin du bon sens ; mais les données dont on dispose sur le sujet composent un tableau un peu plus compliqué. Certaines études suggèrent un lien entre la diversité des instances dirigeantes et la performance des entreprises, notamment dans le secteur bancaire, dont parlait justement Christine Lagarde. Beaucoup d’autres études ont relevé un lien entre la diversité des équipes dirigeantes et la performance non-financière, en matière de responsabilité sociale et environnementale. 

Mais en ce qui concerne la performance financière, les données sont ambiguës et pas toutes cohérentes. Certaines études montrent un lien positif entre diversité et performance ; d’autres un effet négatif ; d’autres pas de lien du tout. A tout le moins, le tableau général qui se dégage n’est pas aussi conclusif que ce qu’on lit généralement dans la presse.

Comment l’expliquer ? D’abord, la performance financière, c’est le résultat de beaucoup de facteurs ! On sait, par exemple, que l’effet propre du PDG sur la performance financière d’une entreprise est modeste ; beaucoup plus faible en tous cas que certains PDG ne voudraient le faire croire quand il s’agit de justifier leur rémunération. De la même manière, l’effet que la composition d’un conseil d’administration ou d’un comité exécutif peut avoir sur la performance d’une entreprise est nécessairement limité. Ce qui peut expliquer qu’il ne suffise pas de faire varier le degré de diversité d’une équipe dirigeante pour améliorer les performances financières d’une entreprise.

Ensuite, quand on met en rapport performance des entreprises et diversité de leurs dirigeants, ce qui est très difficile à démontrer, c’est le lien causal. Il est tentant de supposer que les entreprises dont le management est plus divers sont mieux gérées et ont donc de meilleurs résultats. Mais on peut supposer aussi que les entreprises bien gérées choisissent plus intelligemment leurs dirigeantes et dirigeants… et qu’elles ont donc naturellement plus de diversité. Après tout, quand on choisit tout simplement les meilleurs, sans biais ni préjugé, on doit avoir plus de diversité. Ce qui suggèrerait que la diversité n’est pas la cause de la performance mais son effet. Les deux mécanismes sont plausibles, et pas incompatibles entre eux. Il est difficile d’en faire la part.

Une partie de la réponse peut venir d’un autre courant de recherche, plus ancien, qui mesure l’effet de la diversité sur la performance des groupes de travail. Est-on plus efficace, plus créatif, plus intelligent quand on est dans un groupe divers ? Là aussi, les données sont partagées, mais elles sont plus faciles à interpréter. La diversité a un effet positif – on a des idées plus diverses. Mais en gagnant en diversité, on perd en homogénéité ; or les groupes homogènes se font plus confiance, sont capables de plus de coopération, et décident plus vite. Donc, la diversité a des avantages, qu’on peut exploiter, mais aussi des inconvénients, qu’il faut surmonter.

Pourquoi est-ce important ? Parce que ces études ne nous disent pas simplement si la diversité, c’est bon ou mauvais. Elles nous disent comment la rendre productive.

Pour avoir le meilleur des deux mondes, il faut d’abord de la diversité dans les idées. Si je m’entoure d’individus qui sont démographiquement différents mais qui pensent exactement comme moi, je n’aurai pas beaucoup progressé.

Surtout, il faut créer les conditions d’un débat où cette diversité d’idées peut s’exprimer ; où chacune et chacun est suffisamment en confiance pour exprimer des points de vue dissonants et conserver le respect et la confiance de ses pairs. Si cette condition n’est pas remplie, la valeur ajoutée de la diversité est celle des idées géniales qui ne sont pas exprimées : elle est nulle.

Au fond, la conclusion que ces études, dans leur ensemble, suggèrent, peut se résumer simplement : si la question, c’est comment améliorer la performance, la diversité dans les équipes de direction, c’est nécessaire, mais pas suffisant. Il faut aussi se pencher très sérieusement sur la manière d’animer les débats, de créer une dynamique de confiance au sein des équipes de travail, et d’adopter des outils qui permettent de créer un dialogue efficace. Bref, il faut de la diversité, bien sûr. Mais aussi de la méthode.


Références :
1. Kirsch, A. The gender composition of corporate boards: A review and research agenda. Leadersh. Q. 29, 346–364 (2018).
2. Eagly, A. H. When Passionate Advocates Meet Research on Diversity, Does the Honest Broker Stand a Chance? J. Soc. Issues 72, 199–222 (2016).
3. Williams, K. Y. & O’Reilly III, C. a. Demography and Diversity in Organizations: A Review of 40 Years of Research. Res. Organ. Behav. 20, 77 (1998).


Publié le mercredi 16 juin 2021 . 6 min. 04

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