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Finalement, on dirait que le télétravail… ça ne se passe pas si mal que ça ! Bien sûr, au début, on a tâtonné. Il a fallu s’aménager un espace dans un coin de cuisine, apprendre aux enfants à ne pas interrompre, et prendre l’habitude de faire des pauses pour prévenir le mal de dos sur une chaise qui n’est pas faite pour qu’on y passe la journée.

Mais après ces semaines d’expérimentation forcée à grande échelle, les télétravailleuses et les télétravailleurs ont trouvé leurs marques. Passé l’inconfort initial, les videoconférences par Zoom sont plus efficaces que les réunions physiques. On peut enfin faire son travail sans être dérangé sans cesse. Et bien sûr, on s’émerveille d’avoir soudain regagné toutes ces heures perdues dans les transports  – pour soi, ou pour les consacrer à travailler plus.

Ces observations rejoignent celles de Nicholas Bloom et de ses collègues, qui ont étudié en 2015 les salariés d’une agence de voyage chinoise au moment où on leur proposait de télétravailler. Résultat : par rapport à un groupe témoin, les salariés tirés au sort pour télétravailler affichent bien un gain de productivité. Et il est considérable : +13%, essentiellement parce que le temps de travail est accru (on ne perd plus de temps à papoter avec les copains). Si on ajoute l’économie sur l’espace de bureau, le gain est de 20 à 30%.  Et les salariés sont plus satisfaits, ce qui se traduit par une baisse du turnover.

On comprend, alors, pourquoi tant d’entreprises semblent maintenant envisager le télétravail comme une solution permanente, ou en tous cas de très longue durée. Google et Facebook ont annoncé qu’ils n’attendent personne au bureau avant 2021. PSA accélère des fermetures de sièges sociaux et veut faire du télétravail la norme, plutôt que l’exception.

Il faut pourtant s’interroger sérieusement sur ce qu’on risque de perdre dans cette transition. On le voit dans les études (comme celles de Nicholas Bloom), mais aussi dans les observations que nous pouvons tous faire depuis le début du confinement : il y a certes des choses qui marchent bien en télétravail, et même mieux – d’où le gain de productivité. Mais il y en a aussi qui marchent moins bien.

Pour schématiser : tout ce qui est formalisé est télérobuste ; tout ce qui est informel est téléfragile.
- Les tâches individuelles bien définies (comme celles des agents de voyage de l’étude de Nicholas Bloom) gagnent en efficacité ; mais pour le travail collectif, c’est beaucoup moins évident.
L’exécution des projets existants se passe bien – voire mieux ; mais la création, la définition d’activités nouvelles, risquent de souffrir.
- Les hiérarchies et les organisations existantes se maintiennent, mais faire évoluer l’organisation devient difficile : l’étude de N. Bloom avait d’ailleurs noté que les télétravailleurs, bien que plus productifs, étaient moins promus.
Les liens sociaux existants sont maintenus par des contacts réguliers en vidéo ; mais sans les rencontres fortuites, sans la cantine, sans la machine à café, le capital social n’est pas renouvelé. D’ailleurs, dans l’étude de Bloom, la moitié des personnes qui avaient choisi le télétravail choisissent, après 9 mois, de retourner au bureau : l’isolement leur pèse.

On peut remarquer que cette typologie du télérobuste et du téléfragile rejoint une des distinctions les plus solidement établies en théorie des organisations : celle que fait James March entre exploitation et exploration. En gros, l’exploitation, c’est l’optimisation de ce que l’entreprise fait déjà ; la recherche de productivité à court terme. L’exploration, c’est le développement d’idées ou d’activités nouvelles, qui sont initialement moins rentables, mais sans lesquelles l’avenir n’est pas assuré. La tendance naturelle des organisations, c’est bien sûr de privilégier l’exploitation, le court terme ; au détriment de l’exploration, le long terme. L’entreprise doit donc lutter consciemment contre cette tendance, qui est profitable dans l’instant, mais auto-destructrice à terme. Or, le risque, si l’on n’y prend pas garde, c’est que le télétravail l’accentue au contraire : la productivité accrue de l’exploitation masque l’abandon de l’exploration.

Un autre risque, lié à celui-là, c’est le délitement du tissu social de l’entreprise. Tout le monde sait bien qu’une entreprise, ce n’est pas seulement un ensemble de gens qui travaillent chacun dans son coin : mais si, physiquement, c’est exactement à cela qu’elle ressemble, en quoi consiste le je-ne-sais-quoi qui fait la différence ? Nous sentons bien, en principe, qu’il y a une différence entre nos collègues, avec qui nous avons une relation durable, et nos fournisseurs ou partenaires externes, avec qui nous avons une relation simplement transactionnelle. Mais où est la différence, quand les uns comme les autres n’apparaissent que sur un coin d’écran ?

En somme, le risque du télétravail généralisé, c’est de perdre le sentiment d’appartenance, la fierté de travailler ensemble, l’envie de se dépasser au service d’un projet commun… bref, tout ce qui fait qu’on est une entreprise. Un risque suffisamment important pour qu’on y réfléchisse à deux fois.


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