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La Chine marche sur une seule jambe et c’est bien pourquoi son économie est bancale. L’objectif de 5% de croissance sera sans doute officiellement atteint, mais derrière cet affichage de circonstance, les indicateurs racontent une autre histoire : la fin d’un cycle hors norme et, pourquoi pas, entre guillemets, un certain retour à la case départ. Explications. Le tableau des contributions à la croissance montre une économie chinoise redevenue ultra-dépendante de la performance de son secteur extérieur, qui alimente les carnets de commandes de ses usines : les exportations sont à un sommet et les excédents n’ont jamais été aussi élevés. Ils ont même franchi la barre symbolique des 1 000 milliards de dollars, soit 6% du PIB. L’impression laissée est donc celle d’une Chine redevenue l’atelier du monde, comme au lendemain de son entrée dans l’OMC fin 2001. Avec toutefois une nuance de taille : le pays a comblé tout ou partie de son retard technologique.
Une consommation intérieure en panne
En face, la demande intérieure fait pâle figure, plus particulièrement la demande des ménages. En cause : des consommateurs prudents dont la confiance a été totalement laminée par la crise sanitaire et qui ne montrent aucun réel signe de redressement depuis trois ans. Plus fondamentalement, au cœur du cataclysme, la chute des prix de l’immobilier. Elle n’en est que plus rude après des années de spéculation effrénée. Le logement, qui concentre près de 70% de la richesse des ménages, devient désormais une source d’angoisse : les patrimoines se déprécient. Or, en Chine, posséder un logement n’est pas seulement un toit : c’est souvent la condition pour se marier, mais aussi une garantie pour les « vieux jours ».
Des plans de relance peu convaincants
Le gouvernement tente bien de relancer les achats via des plans massifs de soutien à la consommation, en les abondant toujours plus, en les ouvrant toujours davantage à une foule de biens et de services. Mais le succès reste mitigé. Il s’agit pour partie de reports d’achats vers les produits subventionnés, d’effets d’aubaine, plus que d’une nouvelle appétence à dépenser davantage. Or, sans le soutien efficace de la demande domestique, le seul carburant des marchés extérieurs ne suffit pas à faire tourner la machine : le taux d’utilisation des capacités de production dans l’industrie manufacturière n’est 1- toujours pas revenu à son niveau d’avant la crise sanitaire et 2- reste inférieur à sa moyenne de long terme. Ce n’est pas un très bon signe pour l’investissement. C’est aussi la marque de l’héritage d’un surinvestissement, encouragé et amplement subventionné par l’État, qui a débouché sur des surcapacités.
L’Europe dans le viseur de Pékin
Tous ces déséquilibres sont perceptibles dans l’évolution des prix à la consommation, qui oscillent entre désinflation (ralentissement de la hausse des prix) et déflation (baisse). Le risque pour l’économie chinoise est donc que la panne de la consommation se prolonge alors que son premier débouché international, les États-Unis — où elle écoule directement 15% de sa production — se referme.
Les entreprises chinoises ont certes eu le temps d’affiner leur stratégie : le premier mandat de Donald Trump les avait déjà placées dans la ligne de mire. Elles se sont redéployées, sont parties à la conquête d’autres marchés et sont même parvenues à regagner quelques parts de marché. L’Europe, en raison du niveau de vie de ses habitants, est la grande cible, et la Chine y engrange de pléthoriques excédents. Mais, comme aux États-Unis, la volonté européenne est de plus en plus de contrôler les flux entrants du « made in China ». La Chine peut parader, elle n’en demeure pas moins économiquement fragile.

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