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Partout dans nos économies de marché, les États prennent à leur charge une part croissante du revenu des ménages. Loin de se limiter à une fonction de redistribution dans un jeu à somme nulle, ils ajoutent toujours plus à leur revenu. On peut y voir une forme de keynésianisme dévoyé, les gouvernements intervenant dangereusement en soutien permanent à la demande globale, et non plus seulement de façon temporaire pour stabiliser nos économies. Mais en vérité, ce qui est à l’ébauche nous rapproche de plus en plus d’un système d’allocation universelle, cette grande aspiration des libéraux les plus purs, Friedman en tête, pour libérer les entreprises de leur responsabilité sociale et leur permettre de jouer sans entrave leur partition de marché.

La socialisation rampante du revenu des ménages

Partons du cas français. Et comparons l’ensemble des salaires nets perçus par les ménages des entreprises (c’est-à-dire après versement des cotisations sociales) à l’ensemble des transferts nets reçus de l’État. Cette seconde masse est définie ici comme la somme des prestations sociales perçues par les ménages sous forme monétaire, accrues des prestations dites en nature (essentiellement l’accès quasi gratuit ou subventionné aux soins de santé, à l’éducation ou au logement) auxquelles on retranche tout ce que ces derniers versent à l’État : l’ensemble des prélèvements sur le travail (cotisations sociales, employeurs ou salariés) et les impôts sur le revenu et le patrimoine. Lorsque l’on rapporte ce flux net au salaire perçu par les ménages, la déformation de la structure de revenu des ménages est manifeste. Et cette dépendance au soutien de l’État a franchi à chaque fois de nouveaux seuils avec les crises de 2000-2002, de 2008 et de 2020. Évidemment, si je m’arrête à ce cas, chacun y verra une spécificité bien française, trahissant la socialisation rampante et anachronique de son économie.

Sauf que ce calcul, lorsqu’il est répliqué à la plupart des grandes économies de l’OCDE, délivre la même tendance et l’amplifie même en termes de variation : États-Unis, Japon, Italie ou Espagne sont logés à la même enseigne que la France en matière de socialisation croissante du revenu des ménages, franchissant comme elle de nouveaux seuils haussiers au moment des crises, ces transferts nets représentant 20 à 30% du salaire des ménages aujourd’hui ou plus. Partout donc les États tendent à se substituer aux entreprises dans la formation du revenu des ménages, jouant un rôle clé dans la défense du pouvoir d’achat et le soutien à la consommation.

Et partout, de surcroît, ce fléchage vers les ménages n’a pas pour contrepartie une hausse de la ponction sociale et fiscale de l’État sur les entreprises. C’est même plutôt l’inverse. En France, la pression fiscale diminue. La ponction exercée par les impôts sur la production, les bénéfices et les cotisations employeur diminue en % de la valeur ajoutée, à l’instar des États-Unis. Et cette tendance à la baisse ou au statuquo de la pression fiscale sur les entreprises ne souffre de quasiment aucune exception. Les ménages reçoivent donc plus sans que les entreprises soient mises à contribution. Bien au contraire.

Le cas particulier de l’Allemagne

Le résultat de celle allocation est évident. N’étant pas financée, c’est d’abord d’elle que provient la dérive de l’endettement public observée depuis plus de 15 ans dans la plupart des pays de l’OCDE. Une dette publique qui vient alimenter le revenu courant des ménages et non de l’investissement.

Seule exception à ce tableau, l’Allemagne qui limite le poids des transferts publics à 5-10% du salaire net. Avec pour contrepartie une bien moindre ponction fiscale de l’État sur les entreprises. Et dans les crises, c’est l’allègement de la pression fiscale sur les entreprises qui permet de maintenir le cap, et de soutenir indirectement la masse salariale. L’Allemagne agit à front renversé avec le résultat que l’on connaît en matière de modération de la dette publique.

Derrière cette dérive, il y a une crise profonde de la distribution primaire du revenu (celle avant impôts et transferts sociaux). La hausse des coefficients de Gini qui étalonne de 0 à 1 le degré des inégalités primaires dans les différents pays en rend compte. Elle a, pour arrière-plan, une crise de la reconnaissance de la valeur travail. Cette dernière a été effleurée, mais tout aussitôt éludée lors des confinements lorsque le Président a évoqué la question des travailleurs « invisibles », essentiels au fonctionnement de nos économies et non rémunérés à leur juste utilité sociale. Les distorsions atteignent une telle ampleur que leur correction a posteriori est hors de portée des instruments de redistribution traditionnels. Et c’est à coup de primes d’activité, de chèques divers et d’allègement de charges et d’impôts financés par de la dette que les États indemnisent les perdants du marché.

Et ce faisant, derrière la montée de dette publique c’est bien un système d’allocation universelle, ou plutôt d’impôt négatif toujours plus étendu diront les puristes, qui est en gestation, sans dire son nom. Ça ressemble à du social, ça a la couleur du social, mais c’est du libéral.


Publié le lundi 20 mars 2023 . 5 min. 33

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