Avec l’automne revient la saison budgétaire et son charabia technocratique qui n’a qu’un but : assurer que tout change alors que rien ne change.
La présentation du budget pour 2024 n’a pas dérogé à la règle : il a été question d’évolutions en tendanciel, en volume, en points de PIB…
Mais quelqu'un y comprend-il quelque chose ? Et existe-t-il un moyen de rendre plus compréhensible ce qui est, après tout, l’utilisation du fruit du travail des Français ?
C’est le sujet de mon billet libéral.
A la première question, la réponse est non. Personne n’y comprend rien. Et à vrai dire, c’est fait exprès.
Depuis cinquante ans, chaque année, l’Etat dépense plus qu’il ne prélève. Et en y ajoutant les collectivités locales et la Sécurité sociale, les comptes ont systématiquement été dans le rouge depuis 1981.
Une fuite en avant unique en Europe… Et pourtant, chaque année, en toute impunité, le ministre du Budget promet le retour des équilibres…
A la seconde question, la réponse est oui. Oui, il existe une manière simple de faire prendre conscience aux Français de la gravité de la situation.
C’est un ancien ministre du Budget, Alain Lambert, qui donne la solution. Je le cite : « Avec l’argent des Français, nous devons compter en euros. Pas autrement. Comment leur demander des efforts personnels si les administrations dépensent selon des indices incompréhensibles ? »
Alors, comptons en euros.
On nous dit : en 2024, le déficit public va baisser, de 4,9 % à 4,4 % du PIB. Et en euros ? Ce même déficit devrait passer l’année prochaine de 138 milliards d’euros à… 129 milliards malgré près de 30 milliards de bouclier tarifaire en moins. Vu sous cet angle, la baisse est à nuancer !
Concentrons-nous maintenant sur le seul Etat.
On nous dit : le déficit de l’Etat reculera de 0,4 point, à -5,2% l’an prochain. Et en euros ? L’Etat dépensera environ 512 milliards, en prélève environ 372 milliards. Résultat, il lui manque 140 milliards pour boucler ses comptes. Ou, si vous préférez, ses dépenses dépassent ses recettes de presque 30%.
Même présentation tronquée sur les dépenses. On nous dit: plan d’économies de 12 milliards d’euros par an jusqu’en 2027, les dépenses vont baisser. De fait, la loi de programmation prévoit qu’entre 2024 et 2027, les dépenses passeront de 55,3 à 53,8% de la richesse produite.
D’accord, mais en euros ? Dans le mille, en quatre ans, les dépenses vont progresser en cumulé de 122 milliards. Souvent, nos technocrates présentent comme une baisse un ralentissement de la hausse.
Sur un seul sujet, le budget parle en euros sonnants et trébuchants : la charge de la dette. Et ces chiffres donnent des sueurs froides. Le paiement des intérêts va passer de moins de 57 milliards d’euros en 2024 à 84 milliards en 2027. Un quasi-doublement !
Cette opération vérité peut être très politique. Ainsi un ancien haut fonctionnaire assure que sur 361 milliards de dépenses de retraites en 2022, 74 milliards ne sont pas financés par des cotisations au taux normal du privé ou par des impôts affectés. Comment mieux justifier l’urgence de la réforme ? Avec une conclusion choc : le déficit des retraites représente de manière récurrente une part importante du déficit public total.
On le voit, l’indispensable redressement des finances publiques passe par plus de transparence, plus de sincérité. Citoyens, exigez une information accessible et compréhensible par tous – en bons milliards d’euros !
Publié le mardi 19 décembre 2023 . 4 min. 28
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de Rémi Godeau
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