Déficit : 20 ans de martingales américaines
Publié le mardi 29 avril 2014 . 3 min. 57
Ceux qui ont cru que le déficit courant des Etats-Unis allait entrainé la chute de l'empire américain n'en croient pas leurs yeux. Le déficit qui s'était creusé pendant 15 ans, un déficit insoutenable selon les meilleurs experts, s'est réduit en quelques années, et en plus, en tirant parti de la plus grande crise financière depuis les années 30. De fait, le déficit s'est amplifié tout au long des années 90. Une année d'exception cependant : 91, avec les financements des alliés pour la guerre du Golfe ! Le déficit passe ainsi par pallier, de 2 de points de PIB à 4 au début des années 2000, pour atteindre 6,2 à son apogée, aux tournants 2005-2006. C'est l'époque de la croissance à crédit, et dans des proportions de plus en plus inquiétantes. Vous pouvez imaginer ce qui se serait passé pour n'importe quel autre pays : une crise de balance de paiement avec à la clé des années de purges sévères à la grecque. Mais ce qui vaut pour le reste du monde, ne vaut pas pour les Etats-Unis qui disposent d'une super martingale : le dollar, indétrônable monnaie de réserve internationale. Mais concrètement comment font-ils ? Et bien, jusqu'au milieu des années 90, le déficit courant est principalement financé par les banques centrales des pays développés qui reconstituent justement leurs réserves. Puis peu à peu, dans l'euphorie de la bulle de la nouvelle économie des années 90, les agents privés vont prendre le relais en achetant des actifs privés, desserrant toujours plus la capacité d'endettement américaine. Bien mieux. Après la crise de change asiatique de 1997, ce sont les émergents qui prennent la suite en se constituant des réserves colossales libellées en dollar. Leurs achats de bons du trésor explosent au tournant des années 2000 et culminent en 2006-2008 pour combler un déficit abyssal. La dette américaine est devenue un produit d'exportation massive ! Cette démesure modifie la géographie des pays contributeurs. D'abord financé par le Japon et l'Europe dans les années 80-90, c'est la Chine qui prend le relais à partir des années 2000 (et de son entrée dans l'OMC). Et si l'empire du milieu soutien les Etats-Unis c'est qu'il y trouve son compte : le Yuan en est sous-évalué, et son principal client est financé à bon compte. C'est l'époque heureuse du G2 et de la Chinamérique. Et pourtant les prémisses d'un changement étaient perceptibles depuis 2006. Le déficit courant s'allège graduellement. La crise financière de 2008-2009 déclenchée par les Etats-Unis ne sera qu'un à-coup momentané, bien mieux, le déficit courant continue de se réduire à une vitesse record et passe sous la barre des 2% du PIB fin 2013. Et la question se pose : quelle nouvelle martingale ont bien pu trouver les américains pour remonter la pente aussi vite et sans casse pour la croissance ? En creusant les chiffres, on détecte d'abord que les Etats-Unis rapatrient des revenus croissants de leurs I.D.E., alors même le monde continue à les inonder en liquidités ?sans compter l'action bienveillante de la Fed. Et puis survient le miracle des pétroles et gaz de schiste qui réduit à la fois la facture énergétique et donne un sérieux coup de pouce à la compétitivité des entreprises. Résultat : un redressement spectaculaire du commerce extérieur. Sacrés américains, ils trouvent toujours la solution : leur créativité économique, stratégique et financière semble sans limite !
Le Graphique, Déficit : 20 ans de martingales américaines, une vidéo Xerfi Canal
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